En plein cœur de Paris, sur l’île de la Cité, rien n’est commun. Ni le lieu, une cathédrale chargée d’histoire et de symboles, sise dans un environnement hautement touristique. Ni le sinistre, l’incendie qui, le 15 avril 2019, a ravagé la charpente et la couverture de Notre-Dame, provoquant la chute de la flèche dans la nef de la cathédrale. Première mesure d’urgence : vingt-huit cintres en bois et en métal ont été posés pour soutenir les arcs-boutants et consolider les voûtes, en partie détruites ou endommagées. Tout restait alors à faire.
Date : 15/01/2021
Loïc Féron
[Reportage publié dans Prévention BTP n°245 - novembre 2020]
Avant de rebâtir, il faut continuer de sécuriser, retirer les vestiges calcinés, évacuer les gravois, démonter les tubes d’échafaudage enchevêtrés, délester l’édifice de toutes les scories de l’incendie (amas de bois et éléments métalliques). Cette énorme tâche est rendue plus complexe encore par l’instabilité de l’ouvrage (risques d’effondrement ou de chute de matériaux) et la présence de plomb due à la combustion de la couverture et de la flèche. Deux décisions fortes ont été prises par la maîtrise d’ouvrage : conserver les entreprises déjà en place – avec des cordistes en renfort – dans le cadre des travaux de restauration de la flèche et instaurer un dispositif exceptionnel de gestion du plomb. Sécurisation et consolidation doivent donc se faire en environnement pollué (pollution surfacique).
Afin de coordonner la gestion collective du risque de pollution, un assistant maîtrise d’ouvrage (AMOA) « plomb » a été désigné. Au-delà de la sensibilisation des entreprises par des modules de formation, c’est un protocole complet qui a été élaboré en concertation avec l’inspection du travail et la Cramif.
Une convention portant sur l’accompagnement du chantier et de ses différents acteurs a été formalisée par l’APST BTP RP et l’OPPBTP avec la maîtrise d’ouvrage. Prises de mesures (métrologie), protection collective – via la création de deux zones séparées par des unités de décontamination – et port des EPI sont la base du dispositif de prévention. L’installation de modules de base avancée, avec point d’eau pour le lavage des mains, et la possibilité de rester en vêtement de travail plutôt qu’en combinaisons jetables participent à la sécurité et au confort des intervenants.
La procédure, très stricte, de conditionnement et d’évacuation des déchets et vestiges réduit a minima les émissions de plomb vers l’extérieur du chantier. Comme il en a été décidé, le traitement du plomb fera partie de la phase de restauration de la cathédrale. Autant parler d’un autre chantier à venir, avec en ligne de mire 2024, pour la réouverture du lieu au public.
Général d’armée Jean-Louis Georgelin, président de l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris
« Dans le cadre de ce chantier patrimonial hors normes, nous avons pris des mesures particulières en termes de prévention. En premier lieu, il est important de souligner la présence physique de l’OPPBTP sur le site pour accompagner l’établissement public.
Par ailleurs, nous nous sommes adjoints les compétences de préventeurs pour garantir la sécurité des compagnons, qui est notre priorité, et d’un conseil “plomb“ afin de trouver le bon équilibre.
Ces mesures permettent de répondre aux attentes des différents intervenants et parties prenantes de ce chantier : riverains, ville de Paris, préfecture, instances et corps de contrôles (inspection du travail) »
Tous les engins sont équipés d’un système anticollision et sont dotés, a minima, d’un automate de sécurité, d’un modem radio avec fréquence dédiée et d’un ensemble de capteurs de mesures. Pour les nacelles, la pose de capteurs, permettant de repérer les engins (en 3D) dans l’espace, constitue une première mondiale. Engin de sécurité prioritaire sur le chantier, la nacelle doit être libre de tout mouvement pour évacuer si besoin les personnes en urgence. A contrario, le moufle de la grue à tour est maintenu à distance des nacelles, qu’il ne peut en aucun cas survoler.
Capable de déplacer jusqu’à 8 tonnes en bout de flèche, la grue à tour (GT1) de 26 tonnes est équipée de capteurs en fréquence radio qui permettent de gérer les interférences avec les autres moyens de levage, grues mobiles et nacelles. Une caméra AGS placée sur le moufle renvoie en temps réel les images des levages sur l’écran de supervision. Les grues mobiles, elles-mêmes dotées de GPS RTK, disposent, tout comme la grue à tour, d’un écran de contrôle grutier. Les grutiers ont suivi une formation spécifique avec le monteur de la grue sur site. Chaque équipe au sol compte un chef de manœuvre, identifiable par un baudrier vert, formé à l’élingage et aux gestes de commandement des grues.
Une grue à tour (80 mètres de haut), trois grues mobiles et trois nacelles sur porteur (70 et 90 mètres de haut) : ainsi se présente le dispositif de levage de charges et de personnes sur le chantier de sécurisation de Notre-Dame. Les déplacements permanents des sept engins nécessitent une gestion pointue pour fluidifier les opérations de levage, empêcher le survol des zones interdites et éviter les collisions. Développé par la société AGS, représentée par Fabrice Reynaud, suivant l’analyse de risque établie par le chantier, le système anticollision intègre les grues mobiles et les nacelles. Davy Bemba Matondo, de la société Epitech, gère toutes les activités de levage et vérifie chaque matin l’adéquation des grues (suivant l’arrêté du 1er mars 2004 relatif aux vérifications des appareils et accessoires de levage). Joignable à tout moment pour coordonner levages et interférences, il dispose d’un écran géant tactile intuitif pour afficher les grues et nacelles en mouvement sur fond de plan de chantier. Des talkies-walkies sont mis à disposition des élingueurs et deux fréquences radio dédiées aux communications sur le chantier.
Au moment de la prise de poste, Davy Bemba Matondo (société Epitech) anime un briefing quotidien levage-adéquation en présence des grutiers et conducteurs de nacelles.
Objectifs : faire le point sur les activités de chacune des grues et des nacelles et les immobilisations pour vérifications-entretien, sur les levages sensibles ou prioritaires, les positions en lien avec les études de sol et les possibilités de manœuvre selon la proximité des zones de travail et les conditions météo (abonnement météo PréviExpert).
Ce briefing fait l’objet d’un rapport quotidien diffusé à l’ensemble des acteurs du chantier. Dans le bureau, le superviseur de chantier AGS retransmet sur l’écran ViewSonic IFP8650-2 la vision en temps réel des positions des différents engins.
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