L'entreprise Joncour détient tout son matériel.

    ©Emmanuel Gabily

    Profil

    Identité : René Joncour.

    Activité : Construction de bâtiments collectifs, tertiaires et industriels.

    Création : 1923.

    Chiffre d’affaires : 10 millions d’euros.

    Nombre de salariés : 52.

    Lieu : Pluguffan (Finistère).

    Conseiller en prévention : Jean-François Cadiou.

    Tradition du métier et nouvelles techniques de construction. Tout ce qui fait la renommée de l’entreprise bretonne René Joncour (Quimper) se trouve là, dans cet état d’esprit fraternel et cette capacité à réaliser un projet technique dans sa globalité.

    Créée en 1923, l’entreprise est dirigée de père en fils depuis bientôt un siècle. À René a succédé René (fils), puis René-Yves (petit-fils) avant Romain, arrière-petit-fils du fondateur et aujourd’hui à la barre du navire. En plein pays bigouden, les établissements René Joncour se sont forgé un ancrage territorial fort, basé sur une certaine tradition du métier, tout en s’adaptant à l’évolution des techniques de construction. Aujourd’hui spécialisée dans la réalisation de bâtiments collectifs, tertiaires et industriels, l’entreprise partage son chiffre d’affaires entre marchés privés et publics (écoles, hôpitaux, salles de sport…). Pas de logement mais de temps en temps une maison d’architecte, comme une cerise sur le gâteau.

    Des modifications sur le matériel

    Actionnaires à 100 % de la SAS, les dirigeants familiaux privilégient un mode de management axé sur l’autonomie. L’entreprise détient tout son matériel (près de quatre-vingt-dix machines), à commencer par les neuf grues entretenues en interne. Elle est fidèle aux fournisseurs français, Potain pour les grues, Retotub pour l’étaiement…, et a renouvelé l’intégralité de son parc de banches Outinord : cent vingt banches inox, et leurs accessoires, auxquelles les chefs de chantier apportent des modifications sur les échelles et trappes d’accès ou la peau de coffrage.

    L’adaptation des équipements, pour un usage plus efficace et plus sûr, est l’un des points forts de l’entreprise. Le parc matériel comprend trois camions spécifiques utilisés selon les besoins, avec plateau droit et rampe télescopique pour le transport des banches et des engins. Son dirigeant, Romain Joncour souligne :

    «Cette démarche d’amélioration continue a été renforcée depuis une quinzaine d’années avec le concours de l’OPPBTP. Elle se traduit par des gains de production et des bénéfices pour la santé de nos compagnons.»

    L’outillage électroportatif ne déroge pas à cette attention, en témoigne l’achat récent de boulonneuses de dernière génération pour le serrage et desserrage des banches. Ou encore le renouvellement complet des tenues de travail. «Nous avons sélectionné trois à quatre tenues différentes en fonction des métiers. Une fois par semaine, l’entretien et le lavage sont confiés à l’atelier Kannti, une entreprise spécialisée dans l’insertion professionnelle pour personnes handicapées.»

    Entreprise Joncour, assemblage des escaliers en atelier. Les escaliers d'accès utilisés sur les chantiers sont réassemblés à l'atelier de menuiserie. ©Emmanuel Gabily

    «Chacun est responsable de la prévention»

    Romain Joncour fait confiance à ses conducteurs de travaux et chefs d’équipe pour transmettre les bonnes pratiques. La dimension humaine de l’activité s’illustre également dans le rôle central joué par les ateliers. L'entreprise René Joncour dispose d’un véritable atelier de menuiserie en plus de celui de mécanique en charge de la maintenance du matériel. Une petite équipe y confectionne tous les coffrages à partir de mannequins en bois recyclés, renforcés par des équerres métalliques et remis en peinture. Les escaliers d’accès utilisés sur les chantiers sont réadaptés ici de la même façon, au milieu de machines, pour certaines anciennes mais robustes et bien entretenues.

    Sans le dire, l’entreprise bretonne est adepte de l’économie circulaire. Son dirigeant s’intéresse aussi aux nouveaux matériaux composites et à leur usage. «J’aime prendre des idées dans des métiers différents, fait-t-il remarquer. Le milieu maritime et le nautisme sont une source d’inspiration.» Ses ateliers ont, par exemple, conçu un coffrage pour voile rond et incliné, semblable à la proue d’un bateau, à partir de feuilles stratifiées de type gelcoat. Comme quoi, l’entreprise René Joncour n’en a vraiment pas terminé avec la construction et l’innovation.

    Bilan performance

    En investissant pour un million d’euros dans le remplacement complet de ses banches inox (cent vingt grands panneaux, petits modules et accessoires), l’entreprise René Joncour a privilégié la performance, la qualité du produit fini et le confort des utilisateurs. Le modèle B 8000 d’Outinord retenu est modifié en interne pour répondre précisément aux besoins. Dans un environnement à forte salinité, l’option avec peau en inox évite que la rouille ne se dépose sur la peau de coffrage.

    La maquette numérique pour anticiper les travaux

    Fidèle à des modes de production traditionnels, l’entreprise Joncour s’est lancée dans le numérique. Un plus pour la rationalisation de la construction selon son dirigeant Romain Joncour.

    Son parcours

    Avec une licence conducteur de travaux et un master en gestion des PME en poche, Romain Joncour a intégré l’entreprise en 2003. Au terme de dix ans comme conducteur de travaux, il en est devenu le dirigeant à l’écoute des salariés et capable d’aller de l’avant.

    Romain Joncour Romain Joncour ©Emmanuel Gabily

    Comment avez-vous pris la décision de vous engager dans le BIM ?

    Nous avons embauché Christelle Guirriec que nous avions eue comme stagiaire il y a vingt ans. Devenue ingénieure, elle a apporté son bagage technique et ses compétences sur le logiciel Revit. Nous avons saisi cette opportunité pour nous lancer dans la maquette numérique, illustrer notre mémoire technique et affiner les différentes phases de l’exécution.

    La particularité de l’entreprise tient à son indépendance, tant en matériel qu’en ressources humaines.

    Romain Joncour.

    Quelles utilisations faites-vous de cette maquette numérique ?

    Le bureau d’études réalise des plans d’exécution sur le logiciel Revit ainsi que les plans d’installation de chantier en 3D avec le plug-in SoBuild. Les chefs de chantier peuvent ainsi mieux visualiser les travaux à venir. Ces outils ont déjà montré leur efficacité dans la construction d’une piscine ou de l’espace Dan Ar Braz. Ils facilitent par exemple le calcul de la surface de circulation et l’identification des aires de retournement pour les camions. Nous pouvons mieux prévoir les besoins en matière de barrières Heras ou des points d’électricité et éviter les oublis.

    Quels sont les apports du BIM en matière de prévention ?

    En plus d’être un argument commercial, le BIM permet de rationaliser la construction. La maquette numérique facilite l’examen d’adéquation des levages, les interactions entre les grues ou l’identification des zones interdites au survol de charges. Elle contribue à utiliser les banches à bon escient, tant en termes de rotation que de stabilisation. Pour la salle des fêtes de Quimper, nous avons pu programmer les rotations de coffrage pour utiliser au mieux les soixante banches mises en œuvre sur le chantier. En passant de la 3D à la 4D, le BIM permet de partager les données entre les différents corps d’état. En y ajoutant les méthodes de travail, on arrivera à la 5D.

    L’ensemble des coffrages est réalisé par l’atelier de menuiserie à partir de mannequins recyclés.

    Atelier Joncour ©Emmanuel Gabily

    Le bureau d’études a intégré la maquette numérique pour le mémoire technique et les phases d’exécution.

    Bureau d'études de l'entreprise Joncour ©Emmanuel Gabily

    Des mannequins ont été utilisés pour présenter aux collaborateurs les différents modèles de vêtements de travail au moment de leur sélection.

    Présentation des vêtements de travail, entreprise Joncour ©Emmanuel Gabily

    Les lests Mateloc, utilisés pour la stabilisation des banches, ont été modifiés pour permettre une meilleure préhension et rendre les angles moins saillants.

    Lests Mateloc, entreprise Joncour ©Emmanuel Gabily

    À chaque chantier est attribué un container matériel sur-mesure incluant ici une station de découpe des tubes PVC avec aspiration.

    Un container matériel sur mesure, entreprise Joncour ©Emmanuel Gabily

    Éric Thomas, le chef de chantier, utilise une ligatureuse électronique qui assemble plus rapidement et en sécurité les éléments de ferraillage.

    Eric Thomas, chef de chantier, entreprise Joncour ©Emmanuel Gabily

    La méthodologie appliquée

    ● Disposant depuis toujours d’une menuiserie, l’entreprise fabrique elle-même ses coffrages pour le béton, ce qui lui offre une grande flexibilité dans l’adaptation des mannequins qui diffèrent d’un chantier à l’autre.  «En plus de conserver notre savoir-faire, nous pouvons faire de la recherche & développement», précise le chef d’entreprise.

    «Nos menuisiers effectuent l’équivalent d’un travail de charpente, mais au millimètre près, explique Romain Joncour. Une fois utilisées, les grandes sections sont rabotées pour servir de renforts intérieurs, avant d’être transformées en cales de coffrage, puis en coins.»

    ● Réalisée avec les EPI requis, une mise en peinture au polyuréthane des coffrages permet au béton de ne pas accrocher au bois pour présenter une surface parfaitement lisse. «Les essais avec le Kairlin, un matériau biocomposite mis au point par la société Kaïros du navigateur Roland Jourdain, n’ont pas donné les résultats escomptés. Mais ce n’est que partie remise.»

    Article paru dans PréventionBTP n°250 d'avril 2021, p. 22-25.

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