Troubles musculo-squelettiques : quels impacts de la campagne auprès des entreprises du BTP ?
La campagne de sensibilisation sur les risques des troubles musculo-squelettiques (TMS) affiche un bilan positif pour l'OPPBTP. Menée à son initiative, du 3 avril au 1er juillet 2023, elle a donné envie d’agir en prévention, et des bonnes pratiques ont été mises en lumière sur les trois phases clés du chantier que sont la livraison, l’approvisionnement au poste de travail et la réalisation des travaux.
Date de mise à jour : 21 févr. 2024
Auteur : Virginie Leblanc
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L’OPPBTP tire un bilan positif de la campagne de prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS) auprès des entreprises du BTP, menée du 3 avril au 1er juillet 2023*.
Particulièrement visible, la campagne est parvenue à toucher une large part des 250 000 entreprises ciblées. Le site dédié memepasmalbtp.fr enregistre notamment 500 000 visiteurs. Les apprentis des établissements de formation initiale ont également été largement touchés grâce à un Kit de sensibilisation sur les TMS, téléchargé plus de mille fois par les enseignants.
Plus de la moitié des 2 005 répondants à l’étude mesurant l’impact de la campagne se souviennent d’un élément et, parmi eux, les messages les plus mémorisés concernent les bonnes pratiques et la sensibilisation au risque. Les affiches et le slogan « Même pas mal » ont particulièrement marqué les esprits.
Parmi les répondants se souvenant d’un élément de la campagne, 48 % ont entrepris une action : 36 % ont affiché des éléments de la campagne dans les locaux, 11 % ont organisé des réunions d’information en interne, 31 % déclarent qu’ils en ont discuté autour d’eux, au sein de leur entreprise.
La campagne a conduit les entreprises à s’intéresser plus amplement au sujet des TMS, en suscitant beaucoup d’échanges dans les équipes. Parmi les répondants se souvenant d’un élément de la campagne, une entreprise sur quatre déclare se sentir plus concernée par le sujet. Elles affirment que la campagne va surtout les aider à évaluer et prévenir les risques, former et sensibiliser les salariés, améliorer les processus de travail pour réduire le risque de TMS, et revoir les critères de choix pour l’achat d’outillage et de matériel.
Un diagnostic TMS jugé utile
En outre, plus de 90 % des 630 entreprises ayant bénéficié d’un diagnostic TMS l’ont jugé utile. Les données recueillies indiquent que les TMS sont très présents dans les entreprises, puisque 73 % des salariés signalent des douleurs au dos, et 41 % au niveau des épaules.
La moitié des professionnels du BTP estime que les TMS ont un impact important dans leur entreprise, cependant cette perception varie fortement selon l’activité ou la taille de l’entreprise (de 38 % pour les entreprises de moins de 10 salariés à 84 % pour celles de plus de 250 salariés). Ces écarts soulignent la nécessité de mettre en place des actions adaptées à la réalité terrain de chaque entreprise. Malgré l’existence d’une réelle préoccupation concernant ce risque, seulement la moitié des répondants à l’étude ayant reconnu un élément de la campagne est engagée dans une démarche de sensibilisation et 10 % dans une démarche de formation.
Les diagnostics ont permis d’obtenir une vision plus claire de la prise en compte des TMS au cours de trois phases clés du chantier :
- Lors de la livraison du chantier, les actions entreprises sont encourageantes. L'amélioration du matériel (71 %), l'utilisation de véhicules adaptés (84 %), et le recours à des systèmes de stockage efficaces (82 %) démontrent une volonté d'optimiser la manutention. Cependant, en fonction de la taille de l’entreprise, des différences persistent : par exemple les grandes entreprises de plus de 250 salariés prévoient plus systématiquement la livraison directe sur chantier.
- La préoccupation pour les TMS se prolonge à la phase d'approvisionnement au poste de travail. Les efforts pour prévoir une organisation efficace (plus de 8 sur 10) et la gestion mécanique des tâches illustrent une prise de conscience. Toutefois, certains secteurs d’activité, notamment le second œuvre, estiment effectuer plus de 80 % de leurs manutentions à la main.
- L'étape cruciale de la réalisation des tâches au poste de travail est abordée avec sérieux. En effet, les répondants intègrent des critères tels que la recherche de minimisation des efforts physiques (96 %) lors du renouvellement du parc matériel et dans l'achat d'outillage. Plusieurs pratiques positives sont mises en lumière, telles que l’adaptation de l'organisation du travail (90 %), la mise en place de temps de récupération à la suite des tâches pénibles ou l’ajustement des horaires en fonction des saisons.
TMS : des pistes d'actions pour mieux les prendre en compte
Si des actions significatives ont été entreprises, des disparités persistent selon la taille ou le secteur d’activité des entreprises. Au vu de ce constat, l’OPPBTP a d’ores et déjà réfléchi à des premières pistes d’action pour aider les entreprises à mieux prendre en compte les TMS et s’en prémunir :
- Mener des actions ergonomiques ciblées sur des situations de travail exposant particulièrement aux risques physiques (vibration, manutention et posture) ;
- Analyser et proposer des actions d’amélioration des situations contraignantes, communes à plusieurs métiers du second œuvre, en phase d’approvisionnement de chantier ;
- Expérimenter de nouveaux équipements d’assistance physique auprès de différents métiers (électriciens, peintres, plaquistes, menuisiers…) ;
- Concevoir un outil d’auto-diagnostic manutention manuelle sur chacun des métiers ;
- Mener un travail avec les fabricants de matériels et de matériaux pour mieux prendre en compte le risque dès la conception des produits ;
- Sensibiliser plus fortement les apprentis en CFA BTP et les nouveaux dirigeants au risque TMS à travers des formations et outils adaptés.
La mise en œuvre prochaine du Fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (Fipu) viendra utilement soutenir les actions engagées par l’OPPBTP, en particulier au travers des aides financières ouvertes aux entreprises. Avec le soutien du Fipu, l’OPPBTP envisage un rebond de la campagne en 2024, avec des accompagnements individuels de 500 entreprises et des actions auprès des jeunes en formation professionnelle.
*Campagne menée en partenariat avec les Services de prévention et de santé au travail BTP et interentreprises, l’Assurance maladie-Risques professionnels et la Direction générale du Travail.
Les TMS sont particulièrement fréquents dans tous les métiers du secteur du BTP et demeurent à ce jour la première cause de maladies professionnelles du secteur (87 % - source Cnam). En effet, les gestes répétés, les efforts soutenus et les postures contraintes priment parmi les principales causes. L’organisation du travail, les facteurs psychosociaux et individuels favorisent également leur apparition, avec des enjeux sociaux (santé au travail, emploi des seniors, désinsertion…), humains (usure professionnelle…), économiques (coûts directs et indirects, perte de savoir-faire, difficulté de recrutement) et juridiques.