Détecter le risque auditif avant qu’il ne soit trop tard

« 67 % des travailleurs de la construction perçoivent le bruit comme une gêne sur le lieu de travail », expose Remy Hubaut, docteur en ergonomie chez Preveno, service de prévention et de santé au travail, à l’occasion des Journées santé au travail de Présanse^*, citant les chiffres de la Carsat des Hauts-de-France. Pour mieux identifier les populations à risque de surdité, le SPST Preveno de Saint-Saulve (Nord), fusion de deux SST du Hainaut, a donc décidé de suivre une large population de travailleurs de ce secteur. Rappelons que le bruit est à l’origine de divers troubles auditifs : surdité, acouphènes, hyperacousie… Les atteintes liées au bruit représentent le troisième risque professionnel dans les Hauts-de-France.

Audition : pertes de l’ordre de 20 dB en moyenne

L’enquête de Preveno rentre dans le cadre du projet de service 2023-2028 du SPST. Entre novembre 2022 et novembre 2023, les équipes du service ont réalisé 2 694 audiogrammes. Parmi eux 691, soit le quart, relevaient des pertes de l’ordre de 20 dB en moyenne. Parfois beaucoup plus. Finalisée en avril 2024, l’analyse plus fine de ces audiogrammes a montré une forte atteinte chez les maçons, les couvreurs, les charpentiers et, de façon générale, dans le gros œuvre. Mais le second œuvre (peintres, menuisiers, électriciens…) n’est pas épargné, du fait de la coactivité.

Fait significatif : l’ancienneté dans l’entreprise des personnes concernées était modérée (cinq ans en moyenne), tout comme l’ancienneté dans le secteur du BTP (douze ans). L’âge des victimes de troubles était également plus bas qu’attendu. La tranche d’âge la plus représentée était la tranche 35-41 ans, la moyenne d’âge des personnes atteintes de troubles s’élevait à 42,6 ans et la médiane à 43 ans. « Le plus jeune avait 14 ans », note Remy Hubaut.

Mesures du bruit et actions correctrices

Dans le cadre de la prévention primaire du risque bruit dans le BTP, les enquêteurs ont réalisé en juillet 2024 des mesures du bruit dans les entreprises concernées afin de pouvoir proposer des actions correctrices. Les investigateurs se sont intéressés également aux raisons du non-port des EPI. La sécurité est un argument avancé (crainte de ne pas entendre un engin qui recule par exemple). La coactivité est également un frein : lorsque plusieurs compagnons travaillent conjointement, il n’est pas rare que ceux qui exercent une activité bruyante se protègent mais pas les autres.

Fort de ces résultats, Preveno a également pris contact avec l’OPPBTP pour monter des actions de prévention primaire auprès des jeunes publics, à l’image du « mystère des bouchons perdus », un serious game destiné aux centres de formations des apprentis.

*Les Journées santé au travail de Présanse se sont tenues les 15 et 16 octobre 2024.