Réemploi des matériaux de construction : Valobat veut démocratiser la pratique
Comment accélérer le réemploi des matériaux issus de la déconstruction ? L’éco-organisme Valobat a présenté un plan d’action pour l'encourager et le généraliser auprès de tous les acteurs de la construction.
Date de mise à jour : 16 nov. 2023
Auteur : Fabienne Leroy
©OPPBTP
Amplifier le réemploi des produits et matériaux issus des chantiers est un objectif primordial pour l'éco-organisme Valobat. Pour y répondre, il vient de présenter un plan d'action. En effet, poussé par la réglementation environnementale et la REP PCMB*, le réemploi est devenu une priorité, avec des objectifs fixés à 2 % en 2024 et 4 % en 2027. Aujourd’hui, il ne dépasse pas 1 %, selon les estimations de l’Ademe.
Outre un cahier des charges ambitieux, Valobat insiste sur un enjeu : faire évoluer les habitudes afin que le réemploi devienne une pratique naturelle de bon sens. Il faut acculturer et sensibiliser les acteurs de la construction avant de structurer et massifier l’offre.
L’éco-organisme teste ainsi différents dispositifs, afin de déployer les plus pertinents dès 2025. Il a déjà lancé un appel à manifestation d’intérêt (AMI) dans le but de sélectionner trois à quatre plates-formes physiques de réemploi existantes, dans le secteur du bâtiment.
Dès cette fin d’année, il lancera une expérimentation auprès de 350 chantiers pour tester l’efficacité de soutiens financiers (diagnostics ressources, accompagnement des maîtres d’ouvrage, dépose sélective, transport, réemploi), et calibrer des soutiens pérennes.
* Responsabilité élargie du producteur des produits et matériaux de construction du bâtiment.
Ce nouveau marché du réemploi est intéressant sur le plan environnemental grâce à la réduction des déchets et à la préservation des ressources locales. Selon Valobat, il deviendra un atout concurrentiel dans l’obtention de labels de certifications. Autre intérêt : il peut devenir une source de créations d’emplois et de développement d’insertion de personnes éloignées de l’emploi. Enfin, les entreprises de travaux pourront acquérir un nouveau savoir-faire qu'elles pourront valoriser.
Former les professionnels et les maîtres d’ouvrage sur le réemploi de matériaux
L'éco-organisme devra au préalable convaincre tous les acteurs afin de générer la demande. Il prévoit donc des campagnes d’information destinées aux maîtres d’ouvrage et aux entreprises de travaux. Le grand public devra également être mobilisé : il est en effet susceptible à la fois de donner (collecte gratuite), et d’acquérir des matériaux de réemploi pour ses propres chantiers (rénovation de combles ou de changement de portes intérieures, par exemple).
Des formations accompagneront les entreprises et les maîtres d’ouvrage pour les aider à faire les bons choix et à maîtriser le cadre du réemploi. Des soutiens au diagnostic ressources seront ainsi proposés, tout comme un accompagnement avec une assistance à maître d’ouvrage.
Matériaux de réemploi : quels circuits de distribution et quel cadre technique ?
La clé du succès passera également par la simplification des circuits d’approvisionnement et la définition d’un volet technique pour utiliser ces matériaux (avec des études consacrées au passage en technique courante).
Les fabricants et les distributeurs seront d’ailleurs accompagnés afin qu’ils puissent respectivement, développer des gammes de produits reconditionnés, et présenter et valoriser leur offre de produits/matériaux issus du réemploi.
Valobat indique que des zones de réemploi seront mises en place sans frais, sur les points de reprise des déchets issus des chantiers. Ces zones seront réservées pour les acteurs du réemploi et, en priorité, ceux de l’économie sociale et solidaire. Des diagnostics PEMD (produits, équipements, matériaux, déchets) seront également diffusés pour identifier les produits réemployables.
Une série d’outils seront mis à disposition des professionnels tels que :
- Des guides de déconstruction complémentaires,
- Des process de dépose et de requalification des matériaux rencontrant des contraintes techniques (charpentes bois ou métal par exemple),
- Un document relatif aux méthodes de stockage, conditionnement et transport adaptées aux matériaux de réemploi,
- Un document dédié coconstruit à partir de groupes de travail avec les assureurs.
Sensibiliser les démolisseurs à la déconstruction sélective
L’éco-organisme inclut d’ores et déjà l’accélération et la massification du réemploi. Il réfléchit, par exemple, aux matériaux les plus lourds tels que les structures béton avec l’apport d’un soutien à des projets de recherche et de développement. Objectif : accompagner les innovations de terrain qui seront remontées. À noter que la sensibilisation des démolisseurs à la déconstruction sélective sera l’une des clés de la réussite, selon l’éco-organisme.
Ce nouveau système de plaques de plâtre ne se jointoie pas.
Un système de cloisons réemployables a été mis au point avec le fabricant Placo® et la Solideo, établissement public en charge de la livraison des 70 ouvrages olympiques.
Sur le village des Athlètes, quelque 60 000 m2 de cloisons démontables ont pu être fournies par le fabricant à l’issue de quatre années de R&D. Une partie des cloisons sera réemployée sur place par les promoteurs dans le cadre de la réversibilité prévue après les compétitions. L’autre partie pourra être commercialisée sur de nouveaux chantiers en région parisienne via un service de réemploi mis en place par le fabricant.
L’innovation technique majeure réside dans le système d’accroche des rails hauts et bas de la cloison. Auparavant vissés, ils sont désormais collés à l’aide d’un ruban de colle sèche et d’une mousse double face pour rendre le démontage aisé et propre. Enfin, ce système ne se jointoie pas (pas de bandes d’enduisage) : les plaques, fabriquées sur mesure, sont posées bord à bord grâce à leurs bords droits.