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Concevoir des étaiements pour des ouvrages de génie civil

Dernière mise à jour le : 22/07/2024

L'étaiement dans le génie civil se distingue de celui du bâtiment par des hauteurs et des charges à reprendre plus conséquentes. Ces caractéristiques conduisent à l'utilisation d'un matériel spécifique. Tour d'horizon sur les différentes formes d'étaiement de génie civil ainsi que la normalisation qui contribue à la sécurité des tours.

L’étaiement de génie civil se distingue de celui du bâtiment par des charges à reprendre plus conséquentes et des hauteurs d’étaiement plus importantes. En effet, il n'est pas rare d’avoir à effectuer des dalles en béton de plus de 30 cm d’épaisseur. De même, la hauteur de coffrage du bâtiment dépasse fréquemment les 6 mètres dans le génie civil et les ouvrages d’art. Par ailleurs, il faut parfois réaliser des dalles en pente sur les ouvrages d’art, ne serait-ce que pour l’écoulement des eaux pluviales. Ces caractéristiques conduisent à utiliser du matériel spécifique.

Compte tenu des charges à soutenir et des hauteurs d’étaiement importantes, le matériel que l’on rencontre en génie civil est le suivant :

  1. Étais métalliques pour forte descente de charges. Ce sont des poteaux provisoires, de section carrée ou triangulaire, composés de profilés réunis par un treillis, assemblés par modules pouvant atteindre des hauteurs importantes (plus de 10 m) et transmettre des charges de plus d’une centaine de kilonewtons.
  2. Tour d’étaiement. Il s'agit de structures autostables de section quadrangulaire composées de poteaux et associée à des contreventements qui reçoivent des charges provisoires. Lorsque plusieurs tours sont reliées entre elles, on parlera de palée ou de plots d’étaiement.
  3. Les palées construites pour les besoins du chantier. Sur certains chantiers importants de génie civil, en particulier sur les chantiers de construction de ponts, on peut être amené à réaliser des palées en charpente métallique pour reprendre de fortes charges.
  4. Les cintres en profilés ou poutre en treillis. Ils permettent de réaliser des passe-charretières pour laisser une circulation à travers l’étaiement ou pour franchir un obstacle. Veillez à bien limiter la flèche des cintres pour éviter des fissurations du béton en cours de prise et des désordres lors de la mise en tension des ouvrages précontraints.

Ces étais sont généralement constitués de modules comprenant des poteaux reliés entre eux par des membrures treillis.

Les tronçons peuvent comprendre 1, 2, 3 ou 4 poteaux. On assemble les modules entre eux pour constituer des étais de la longueur requise. Un système de vérins en tête ou en pied permet un réglage fin à la hauteur exacte de la pièce à étayer.

La capacité portante de ce type d’étais est généralement de l’ordre de 200 kN. Le fabricant fournit des abaques qui donnent la résistance en fonction du déploiement mais également de la pression du vent.

Du fait de leurs dimensions et de leur poids, ces étais sont assemblés au sol et mis en place avec un appareil de levage. En effet, plus l’étai est long et élancé, plus il est soumis aux effets du second ordre issus d’une certaine courbure latérale et donc d’une flexion s’ajoutant à la compression. La prise au vent ne fait qu’accroître ces effets, si bien que la résistance diminue non seulement avec la hauteur de l’étai mais aussi avec la pression du vent.

Les étais de génie civil peuvent être utilisés en files pour constituer des palées. Un exemple courant est l’étaiement contre les piles destiné à recevoir des poutres préfabriquées pour les ouvrages du type Prad (pont à poutres précontraintes par adhérence). Ce type d’étaiement supporte généralement une passerelle de travail permettant un poste de travail sûr lors de la pose des poutres.

Il est à noter que ces palées de tours peuvent être remplacées par des consoles fixées sur les piles. Cet outil comporte les consoles support des poutres précontraintes ou en béton armé ainsi que la passerelle de travail. L’avantage est de disposer d’un système intégré, parfaitement protégé contre les chutes. Les inconvénients de ce système d’étaiement sont le poids important des éléments manutentionnés, nécessitant un appareil de levage, ainsi que son coût, qu’il faut amortir par un grand nombre de réemplois sur des ouvrages identiques.

Sur les chantiers d’ouvrages d’art, on peut être amené à reprendre, pendant la construction de tablier notamment, des charges importantes (plusieurs milliers de kilonewtons) dépassant les capacités du matériel courant disponible sur le marché. C’est pourquoi on conçoit de véritables éléments de charpente métallique pour les besoins du chantier.

Examinons ci-après un certain nombre de cas dans lesquels ce type d’ouvrage de soutènement est utilisé.

  • Lors du poussage du tablier, on peut être conduit à recouper la portée par une palée intermédiaire pour limiter le porte-à‑faux.
  • Lors de la construction d’un pont métallique à poutres de type PRS (profilés reconstitués soudés), un tronçon de poutres est posé à cheval sur la pile pour constituer un fléau. Le tronçon central de la travée est posé ensuite dans la continuité. Un étaiement de forte capacité permet de soutenir l’ensemble au niveau de la jonction, le temps de la soudure.
  • Lors de la construction d’une estacade dont le tablier est constitué de grandes poutres en béton armé, il convient d’appuyer les poutres sur un étaiement de forte capacité, pendant le coulage d’un chevêtre.

Les tours d’étaiement comprennent généralement quatre poteaux porteurs. Contrairement aux étais de génie civil, les poteaux sont éloignés les uns des autres. Ils sont reliés par des membrures, qui augmentent la raideur au flambement. Les dimensions vont de 0,70 à 2,20 mètres. On rencontre couramment des dimensions transversales de 1, 1,20 ou 1,50 mètre. Les tours échelles sont constituées sur deux plans par des montants en forme d’échelle, reliés entre eux par des membrures de contreventement.

En général, les tours d’étaiement utilisées en génie civil ont des cadres triangulaires. Ce sont des systèmes de contreventement plus efficaces que les cadres en échelle, qui permettent de reprendre des charges plus importantes.

La note technique NT24 de la Cramif concerne les tours échelles et les tours d’étaiement qui se caractérisent par une hauteur comprise entre 2,50 et 6 mètres. Ce document a été réalisé pour améliorer ce matériel notamment en matière de sécurité des utilisateurs. Les tours ainsi conçues sont qualifiées de MDS (montage et démontage en sécurité). Les dispositions suivantes ont été reprises dans la norme NF P93-551de mai 2016, dans le paragraphe « Exigences fonctionnelles et dispositions constructives » :

  • Les opérations de montage ou de démontage doivent pouvoir s’exécuter en sécurité collective eu égard au risque de chute de hauteur vers l’extérieur de la tour (protection latérale).
  • Les éléments de composition de la base doivent permettre l’accès facile à l’intérieur de la tour. Deux classes sont définies, en fonction des planchers : A1 avec planchers couvrant toute la surface, espacés verticalement tous les 2 mètres de haut, ou A2 avec planchers couvrant la moitié de la tour, espacés verticalement tous les 1,50 m maxi en alternance.
  • Les échelles d’accès peuvent être intégrées à l’ossature ou rapportées. La section et l’espacement des échelons sont définis.
  • Trois classes de protections latérales sont définies suivant le diamètre de la sphère qu’elles peuvent arrêter : 0,47 m (RL1), 0,60 (RL2), 0,75 (RL3).
  • Le plancher du dernier niveau de la tour doit occuper la totalité de la surface et être équipé d’une trappe et d’une protection latérale.
  • La tour assemblée doit pouvoir être déplacée à la grue. Elle doit comporter des points de levage identifiés intégrés (classe G1) ou rapportés (classe G2). Pour rester solidaires, les composants doivent être verrouillés entre eux par des dispositifs intégrés aux composants (classe G1) ou à défauts rapportés (classe G2).
  • Les plateaux doivent répondre aux critères de charge demandés pour un échafaudage de classe 3 et reprendre une charge répartie de 200 daN/m2. Ils doivent être antidérapants. Les plateaux doivent être munis d’un dispositif antisoulèvement à mise en place automatique. Ils comportent une ouverture de 0,45 x 0,60 mètre équipée d’une trappe auto-rabattable s’ouvrant latéralement par rapport à l’échelle et ménageant une garde à main.
  • Les tours doivent pouvoir être reliées par des passerelles, équipées de garde-corps, pour permettre le passage d’une tour à l’autre, constituant ainsi un platelage lorsque les tours sont reliées en plot.
  • Les vérins de pied et de tête doivent être en acier, quel que soit le matériau constitutif de la tour. L’épaisseur nominale des plaques d’appui doit être d’au moins 8 mm. La surface des plaques d’appui en pied doit être d’au moins 185 cm² et sa largeur minimale de 140 mm. La longueur de recouvrement minimale doit mesurer 25 % de la longueur totale de la tige ou 150 mm (la valeur la plus grande doit être choisie). À noter que la charge conventionnelle de service est calculée avec la sortie des vérins de pied et de tête au maximum, quelle que soit la classe de la tour.
Exemple de désignation d’une tour acier :
Tour acier NF P93-551 TFS 45 120x160 A2-RL2-G1
Une charge conventionnelle de service par poteau de 45 kN (tour de 6 m, vent 20 daN/m²)
Des dimensions : 120 × 160 cm
Un accès intérieur par planchons alternés A2
Un clair de 520 mm en protection latérale RL2
Des dispositifs intégrés de verrouillage et de levage G1

Pour connaître la valeur exacte de la charge admissible, il faut consulter la notice du fabricant, qui indiquera une charge de service unique correspondant à une tour d’au moins 6 mètres de hauteur et d’un cadre de haut, avec une sortie des vérins de tête et de pied maximale, soumise à un vent de service exerçant une pression de 20 daN/m² (environ 65 km/h).

Certains fabricants comme Mills proposent des dispositifs qui permettent la construction d’un plancher continu en tête des tours, juste en dessous du coffrage, afin d’effectuer les tâches de pose et d’enlèvement du coffrage en toute sécurité.

Ce fabricant propose également de réaliser des plans en 2D et en 3D ainsi que la nomenclature complète du matériel à commander, via le logiciel Neomi 3D. Il permet de générer des dessins de structure directement exploitables dans le logiciel Autocad. On peut ainsi vérifier en amont du chantier que le plan est conforme aux besoins et que la livraison de matériel sur chantier sera bien préparée. Cela permet de respecter le Code du travail, qui impose un plan et une note de calcul pour les étaiements de plus de 6 mètres de hauteur.

Téléchargez la fiche prévention « Étaiement de génie civil - Conception »

Selon le Code du travail, la conception des étaiements d'une hauteur de plus de 6 mètres est justifiée par une note de calcul et leur construction réalisée conformément à un plan de montage préalablement établi, sauf en cas d'urgence ou d'impossibilité. La note de calcul et le plan de montage sont conservés sur le chantier. Ces dispositions ne sont pas applicables aux étaiements mis en œuvre pour l'exécution des travaux souterrains (article R4534-105 du Code du travail).

Il convient par ailleurs de se référer à la notice du fabricant d’étais qui indique la capacité des étais en fonction de leur classe et de leur déploiement.

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