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Recépage de pieux en béton

Dernière mise à jour le : 12/11/2024

Nécessaire sur certains chantiers de construction, une opération de recépage de pieux en béton réclame une analyse du choix de l’outil à utiliser ainsi que des mesures de prévention associées.

Quelle que soit la nature du pieu - battu, vissé ou moulé (c'est-à-dire coulé en place dans le terrain) -, une fraction du béton mis en œuvre ne respecte pas la qualité attendue pour l’ouvrage définitif.

Dans le cas des pieux préfabriqués, les techniques de mise en place (battage, fonçage, vibrage ou vissage) exercent des contraintes sur la partie supérieure du pieu.

Dans le cas des pieux moulés, le béton se mélange à des impuretés (débris de terrain, boues de forage) et ne peut pas atteindre la performance attendue.

Le recépage consiste alors à éliminer cette partie indésirable.

Le niveau de recépage correspond au niveau théorique fini du pieu comme, par exemple, la sous-face de la semelle de reprise. Le coulage du béton se poursuit jusqu’à ce que le béton pollué dépasse le niveau théorique de recépage.

Contrairement au niveau de la plate-forme, laissée à l’appréciation du concepteur en fonction de la configuration du site et de la nature du projet, la hauteur théorique de recépage est limitée par le DTU 13.2.

Dans le cas de pieux battus préfabriqués en béton, la hauteur sur laquelle la tête d’un pieu en béton armé est dégarnie est au moins égale à deux fois et demie la longueur ou le diamètre.

Dans les autres cas, la hauteur limite de recépage, entre le niveau théorique de recépage et l'arase est de 0,3 (z + 1 m) m lorsque le niveau théorique de recépage se situe à une profondeur z, sous la plate-forme de travail, inférieure à 5 m et de 1,80 m lorsque le niveau théorique de recépage est à plus de 5 m sous la plate-forme de travail.

Cas particulier dans lesquels la hauteur à recéper peut être modifiée

  • Lorsque l’arase se situe dans des sols mous (facilement liquéfiables
    par les vibrations dues au battage) pour pallier le risque de striction du béton.
  • Lorsque l’arase de bétonnage est basse (très inférieure au niveau de la plate-forme de travail du forage) et rend le contrôle du niveau de coulage difficile. Ce phénomène est accentué par la réalisation de pieu tubé dont la virole est enlevée lors de la mise en œuvre du béton.
  • Lorsque la plate-forme de travail pour le recépage n’a pas été exécutée à la cote prévue initialement (due à une modification de projet de terrassement, par exemple).
  • Lorsque la cote d’arase du béton n’a pas tenu compte de la longueur utile du pieu.

Les travaux de recépage peuvent donc prendre une ampleur importante.

Il peut y avoir une différence entre la hauteur théorique et la hauteur réelle à recéper. Deux cas existent.

  • Dans le premier cas, la plate-forme de travail se situe au même niveau ou à un niveau légèrement supérieur au niveau théorique de recépage. C'est le cas le plus favorable, à privilégier puisqu’il permet de minimiser la hauteur réelle de recépage sur le béton durci et de réduire le risque d’éboulement et de chute lors des fouilles nécessaires pour atteindre le niveau d’arase. L’élimination du béton pollué peut se réaliser par déversement de celui-ci jusqu’à ce que le béton sain (non pollué) arrive à la cote de la plate-forme. Le recépage sur béton durci est alors sensiblement réduit. Pour limiter les risques de glissade sur la plate-forme et réduire l’impact environnemental des travaux, il est important de prendre des dispositions pour éviter que le béton ne se répande : contrôler la quantité de béton mise en œuvre, afin d’éviter les excédents, et prévoir la récupération du béton pollué, par la création de « cunettes » pour collecter le béton, le pomper et évacuer le béton excédentaire.
  • Dans le second cas, la plate-forme de travail se situe à un niveau supérieur au niveau de recépage. Le recépage génère presque systématiquement une intervention sur béton durci. Elle constitue une opération fastidieuse et coûteuse. Une recherche de moyens permettant de diminuer la hauteur à recéper du béton durci est toujours nécessaire. On peut procéder, par exemple, à un curage partiel du béton frais à la pelle manuelle ou mécanique si le forage comporte une virole de tête, puis effectuer le recépage sur la hauteur restante, après durcissement du béton. Il convient de protéger la surface d’arase de toute contamination du fait du retrait de la virole et du risque d’éboulement du forage de tête. Cette méthode peut être rendue difficile dans le cas d’armatures denses ou du fait du brassage occasionné par le curage.

Pour travailler en sécurité, on anticipera la plate-forme de travail pour le recépage en amont.

Comme toute opération de démolition, le matériel définit la méthode de mise en œuvre. Le choix du matériel utilisé doit répondre à deux objectifs :

  • garantir la sécurité et la santé des salariés lors de l’exécution,
  • préserver l’efficacité du pieu et sa pérennité ; il doit permettre
    de sauvegarder le bon état des armatures et éviter la fissuration en tête du pieu ou le cisaillement de son fût.

Chaque technique présente des avantages et des risques spécifiques. Ces méthodes, ainsi que les moyens de prévention adaptés à chaque techniques sont présentées ci-après.

Le recépage mécanique

Cette technique consiste à utiliser un éclateur hydraulique (ou 'brise-pieux), étudié spécialement pour le recépage de pieu circulaire. Il peut être adapté aux pieux de section rectangulaire.

Ce matériel est constitué d’une couronne équipée de couteaux et de vérins hydrauliques, dont les axes convergent vers l’axe du pieu.

Chaque vérin déplace un couteau en acier spécial biseauté, qui applique un effort horizontal sur le pieu. La pénétration des couteaux dans le béton provoque son cisaillement et permet la constitution de galettes de béton d’environ 30 cm d’épaisseur. La couronne est modulable, ce qui permet le recépage de pieux de diamètre variant de 350 à 1 500 mm. Cette méthode est particulièrement intéressante dès que la quantité de béton à recéper est supérieure à 50 m3.

Le recépage avec un éclateur hydraulique

Cette opération consiste à :

  • positionner la cote de recépage au laser ;
  • guider l’appareil jusqu’à sa position de travail ;
  • déclencher le mécanisme jusqu’à la chute de pression
    des vérins ;
  • séparer la galette broyée des armatures en la levant verticalement ;
  • évacuer les blocs de béton après stockage.

Le principal intérêt du recépage mécanique réside dans l’éloignement du personnel de la zone de travail et dans l’amélioration des conditions de travail grâce à la diminution des interventions manuelles.
Comme la découpe fragilise la tête du pieu, elle ne peut s’effectuer qu’en laissant une garde de 10 à 20 centimètres au-dessus de la hauteur d’arase. Le recépage de la hauteur restante doit être réalisée au BRH ou au marteau-piqueur ou de BRH.

Le levage de la galette de béton broyé peut être gêné par la présence d’armatures transversales dans le pieu. Cela peut générer une traction importante de l’appareil de levage, répercutée partiellement sur le pieu. Afin d’éviter l’étirement des aciers, il faut :

  • placer des gaines-fourreaux sur les aciers situés sur la hauteur à recéper ;
  • dès la conception du ferraillage, limiter autant que possible la présence de cerces au-dessus du niveau d’arase ;
  • repérer les cerces qui resteraient au-dessus de l’arase, et procéder à leur découpage avant enlèvement de la galette.

Les risques spécifiques à cette méthode sont liés à la découpe des cerces et à la manutention des galettes :

  • L’opérateur qui découpe les cerces est exposé à un risque de heurt par effet pendulaire de la charge. Pour prévenir ce risque, l’axe des élingues doit être confondu avec l’axe du pieu, et il faut maintenir la charge pour éviter son déplacement lors du découpage. L’opérateur ne doit pas se positionner entre le pieu et une paroi ou sous la charge.
  • Lors de l’enlèvement de la galette de béton, la couronne de vérins est suspendue à une pelle hydraulique. L’opérateur doit garder en permanence la vision sur la galette en cours de retrait pour éviter tout heurt pendant son mouvement.

Le recépage par fluide haute pression

Cette technique utilise un robot d'hydrodémolition : un chariot robotisé porteur d’une lance qui envoie un jet d’eau sous très haute pression (1 000 à 1 500 bars). Une pompe haute pression mobile alimente la lance. Le débit est de l’ordre de 230 l/min. La lance est rigide, en inox et équipée d’une buse dont la forme est adaptée aux travaux à exécuter.

La destruction du béton par le jet d’eau se fait grâce à un transfert d’impulsion lorsque le jet d’eau frappe la surface du béton, apportant une force supérieure à la résistance du béton. La vitesse du jet est proportionnelle à la pression de sortie de la pompe.
De façon empirique, la pression de la pompe doit être au moins deux fois supérieure à la résistance du béton pour obtenir une destruction optimale du béton. Cette destruction sera, en outre, d’autant plus efficace que le béton sera fissuré ou microfissuré, du fait de la pénétration de l’eau sous
pression dans les fissures.
Cette méthode garantit une précision de réalisation et un fini de surface propre à recevoir un nouveau béton.
Ce procédé permet de tenir éloigné le personnel de la zone d’activité, grâce à des commandes à distance.

Les risques spécifiques à cette méthode sont liés à l’utilisation de jet à très haute pression, mais également à la projection de morceaux de béton et au bruit.

Pour prévenir ces risques

  • La machine doit être placée au plus près de sa zone d’action.
  • Lors de l'utilisation du jet haute pression, aucun travailleur ne doit se trouver à proximité de la zone de travail.
  • Des écrans de protection doivent être installés, si les protecteurs de la machine sont insuffisants.

Ces écrans doivent être stables, délimiter la zone dangereuse et être en acier, le bois pouvant éclater sous la pression du jet.
Un panneau de signalisation de danger doit être apposé sur l’écran de protection. L’utilisation de la machine pourra également être signalée par un avertisseur sonore.

Par ailleurs, la vitesse de l’eau en sortie de buse avoisine les 450 m/s, et génère un niveau de bruit élevé. Il peut être nécessaire d’équiper le personnel de protections auditives.

Le recépage au BRH

Lorsque les conditions du site le permettent, avec l’accord des bureaux de contrôle, on pourra opter pour un recépage avec un brise-roche hydraulique (BRH) monté sur une pelle.

Ce procédé génère des vibrations qui peuvent provoquer un défaut d’adhérence sur les armatures ou un cisaillement du fût du pieu à n’importe quelle profondeur, rendant le pieu inutilisable.

Cette technique ne peut donc être utilisée qu’en la couplant avec des méthodes de précisaillage des pieux à la hauteur souhaitée. Ces dispositions devront impérativement être validées par le bureau de contrôle qui suit l’opération.
L’outil doit être placé le plus verticalement possible, pour éviter des efforts latéraux que les pieux ne reprennent pas en règle générale. Le recépage au BRH doit intervenir sur un béton ni trop résistant, car les efforts appliqués et l’énergie nécessaire seraient trop importants, ni trop faiblement résistant, pour éviter des fissurations du pieu. Le recépage devra être terminé manuellement sur une dizaine de centimètres.

Les risques liés à cette méthode

Ce sont le bruit, la chute de blocs instables, la projection de blocs, la production de poussières, l’instabilité de l’appareil, l’inadéquation de l’appareil au site, les vibrations pour le conducteur de la pelle, ainsi que les problèmes liés à la coactivité.

La prévention de ces différents risques s'appuiera sur :

  • la réalisation d'une étude préliminaire pour définir les conditions d’exécution ;
  • le choix d'un matériel adapté aux travaux à réaliser, notamment en termes de puissance, de stabilité et d'équipements pouvant réduire les vibrations. Opter pour une pelle hydraulique avec une fonction flèche flottante (smart boom), un siège antivibratile ainsi qu'une cabine pressurisée et insonorisée permettra notamment de réduire l'exposition de l'opérateur.
  • la définition des mesures de prévention propres au site, par exemple :
    - la stabilisation de talus, et le blindage des fouille si nécessaire ;
    - l'éloignement des opérateurs non concernés directement par l’opération ;
    - la protection d’ouvrages ;

Il convient également d'équiper les opérateurs travaillant à proximité de protections auditives adaptées.

Recépage avec des agents expansifs

Dans le cas de pieux ronds ne comportant pas de cerces de frettage, on peut réaliser un recépage à l’aide d’agents expansifs, parfois appelé « prérecépage ».

Le principe consiste à :

  • protéger les fers en attente et les tubes sondes avec des
    gaines de mousse pour empêcher l'adhérence du béton ;
  • positionner les flacons fournis par le fabricant à l’altitude exacte de recépage, à l’aide de platines spéciales. La forme des flacons est spécialement étudiée avec un profil en toupie, pour privilégier la fissuration dans un plan horizontal. Les gaines des armatures contribuent à créer une amorce de fissuration dans le plan souhaité ;
  • introduire l’agent expansif à l’aide du doseur et de l’entonnoir fournis, après trois jours minimum. Cette phase est délicate : L'utilisation des EPI recommandés par le fabriquant dans sa notice d'instructions permet de se prémunir contre les effets des produits utilisés.
  • lever le bloc au moment du terrassement après apparition des fissures horizontales au niveau de recépage.. Cette phase peut
    se révéler très délicate si les gaines de mousse sont endommagées
    et que le béton s’est collé aux aciers. L’engin utilisé doit pouvoir exercer un effort de traction suffisant pour détruire ce lien.

Le recépage à l’aide d’explosif

Dans le cas de puits nombreux et de gros diamètres, on peut réaliser des recépage avec de petites charges d’explosifs et une mise à feu avec de faibles retards. Cette technique spécifique est très rarement utilisée. Elle requiert l’établissement d’un plan de tir par des spécialistes ainsi qu’une organisation particulière. Cette méthode est à réserver à des cas très spécifiques, avec l’accord des bureaux de contrôle.

Le recépage au marteau-piqueur

En dernier recours, on optera pour un recépage manuel au marteau piqueur. Cette option expose les opérateurs à des TMS. Elle n'est utilisée que sur des hauteurs limitées, pour finir un recépage mécanique ou lorsque les méthodes précédentes ne sont pas applicables.

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