La prévention, facteur d’attractivité

Engagé auprès des adhérents de la FNTP pour les accompagner dans la transition écologique, son président, Alain Grizaud, porte également l’objectif ambitieux de zéro accident du travail mortel en 2028. Avec le partenariat pour l’amélioration de la santé au travail dans les TP, renouvelé en 2023 avec le ministère du Travail, la Cnam, l’INRS et l’OPPBTP, l’organisation renforce son engagement sur le sujet et initie diverses actions spécifiques à ses risques et à ses métiers.

Quelles sont les orientations de l’activité des TP en ce début d’année 2024 ?
L’activité dans les travaux publics est dynamique, portée par l’effet de cycle électoral, la limitation de l’inflation sur les matériaux et la transition écologique. Néanmoins, plusieurs facteurs de risque liés à la hausse des taux d’intérêt doivent être « monitorés » de près : les difficultés de trésorerie des entreprises aggravées par les délais de paiement, l’effet de contagion de la crise du secteur immobilier avec l’effondrement des droits de mutation des départements et la chute de l’activité en Île-de-France liée aux Jeux olympiques.

Comment accompagnez-vous vos entreprises à la transition écologique ?
Dès 2021, notre secteur a défini sa trajectoire sectorielle de réduction des émissions de gaz à effet de serre et identifié les leviers d’action pour atteindre la neutralité carbone en 2050 avec l’aide de deux cabinets de conseil en énergie-climat (Carbone 4 et Utopies). Depuis, la FNTP a engagé de nombreuses actions avec la création d’outils et des formations à destination de l’ensemble des collaborateurs des entreprises de travaux publics. Notre objectif est clair : ne laisser aucune entreprise sur le bord de la route. En matière de transition écologique, de grands bouleversements dans la commande publique, la réorientation des financements bancaires et des conditions d’assurance sont en train de s’opérer. Ils vont considérablement impacter nos activités dans les années à venir. Ces bouleversements doivent être anticipés et accompagnés. C’est le rôle que s’est fixé notre fédération professionnelle avec, en 2024, la constitution d’un référentiel bas carbone, la création d’une école de formation continue dédiée à la transition écologique, le lancement d’une initiative inédite pour sensibiliser les élus locaux aux effets du changement climatique dans leur territoire (InfraClimat), la proposition faite aux organisations syndicales de travailler ensemble pour renforcer considérablement l’attractivité de notre profession.

La FNTP porte un objectif ambitieux de zéro accident du travail mortel en 2028. Comment vous mobilisez-vous pour l’atteindre ?
Oui ! L’objectif est ambitieux mais atteignable. Nous faisons aujourd’hui deux constats : sur la sinistralité, les collaborateurs intérimaires sont les plus exposés. En outre, nous ne disposons pas aujourd’hui de données propres au secteur des travaux publics en matière d’accident du travail et de maladie professionnelle. Nous avons donc besoin d’une connaissance plus fine de notre sinistralité et de son coût pour notre secteur. Ces données exhaustives nous permettraient d’établir un état des lieux sur lequel baser nos actions de prévention, mesurer et célébrer nos progrès pour atteindre le plus rapidement possible l’objectif de zéro accident mortel dans les travaux publics. C’est le premier axe de notre feuille de route pour l’atteindre.
Le deuxième axe porte sur le renforcement de notre engagement en matière de prévention et de santé au travail par le biais de la convention nationale de partenariat pour l’amélioration de la santé au travail dans les travaux publics, renouvelée sur 2023-2028, le 10 mai 2023. J’insiste sur le caractère fondamental que revêt pour la FNTP cette démarche partenariale, avec le ministère du Travail, la Cnam, l’INRS et l’OPPBTP, autour de cet enjeu de la prévention en santé et sécurité au travail.
Dans le cadre d’un troisième axe, la FNTP souhaite être le moteur d’une nouvelle coopération entre prévention, prévoyance et performance avec l’OPPBTP et PRO BTP. Ainsi, nous traitons la prévention dans sa globalité : une prévention efficace réduit les risques, protège les salariés, réduit l’intervention des régimes de prévoyance, l’absentéisme et le coût de la sinistralité, ce qui est bénéfique pour la performance de l’entreprise.

Quelle analyse faites-vous des accidents graves et mortels qui demeurent à un niveau élevé, et, plus généralement, quelle appréciation portez-vous sur la situation en santé au travail dans les TP ?
Les femmes et les hommes de nos entreprises sont nos premières richesses. Sachons en prendre soin tous les jours grâce à des actions de prévention en faveur de la sécurité et de la santé au travail. Cet investissement personnel de chacune et de chacun contribue directement à la rentabilité de nos sociétés. Nous pouvons faire de la prévention un vrai facteur de différenciation et d’attractivité. Depuis de nombreuses années, la FNTP promeut la culture de la prévention en matière de sécurité et de santé au travail comme un enjeu politique fort et stratégique pour les entreprises de travaux publics. Et cela ne doit pas changer. Mais nous devons faire davantage. Assurer la santé et la sécurité des salariés de notre secteur est fondamental. Un accident sur un chantier des travaux publics, d’autant plus s’il est mortel, est insupportable, inacceptable.

Quelles actions spécifiques sont menées auprès des publics comme les intérimaires et les jeunes, particulièrement sujets aux accidents sur les chantiers ?
La formation constitue notre priorité d’action en matière de prévention, et c’est la raison pour laquelle la FNTP a souhaité faire du Pasi BTP un outil majeur. L’objectif de cette formation est d’assurer la sécurité au travail des salariés intérimaires sur les chantiers de travaux publics. Il s’agit d’une formation de deux jours aux prérequis fondamentaux de la sécurité, dispensée par l'un des organismes de formation référencés par EGF. Le Pasi BTP est un outil puissant de lutte contre les accidents sur chantiers. Les premiers résultats le confirment : jusqu’à 40 % d’accidents en moins pour les intérimaires formés par rapport à ceux qui n’ont pas reçu de formation.
Le socle commun prévention TP constitue un autre outil important. Il s’agit d’intégrer, en particulier au sein de la formation initiale, les connaissances et compétences de base en matière de sécurité et santé au travail dans les travaux publics. L’objectif est que les jeunes nouvellement diplômés et primo-entrants au sein de nos entreprises maîtrisent ce socle.

Quels risques majeurs font l’objet d’actions spécifiques de la FNTP ?
Dans le cadre de la convention nationale de partenariat précitée, un groupe de travail est mobilisé sur les risques chimiques. L’objectif principal est d’aider les entreprises à maîtriser leurs expositions aux risques chimiques dans un cadre réglementaire évolutif, notamment sur l’amiante et la silice cristalline alvéolaire. Cela passe par une construction commune des documents pratiques et incontournables pour la profession, qui seront un préalable à respecter et permettront un alignement commun pour avancer tous ensemble. Un autre groupe est dédié au « Bien-être au travail », au sein duquel nous abordons les différents risques professionnels liés aux fortes chaleurs et au travail de nuit. Nous y traitons également des addictions – y compris celles relatives aux outils numériques –, des sujets du sommeil et de la nutrition, qui ont une incidence directe sur la santé au travail. La FNTP est également mobilisée sur la prévention des heurts engins-piétons au sein de l’action « Stop Collision » pilotée par l’OPPBTP.

Les technologies numériques investissent les métiers des TP. Quelles sont les incidences en prévention des risques ?
La FNTP a beaucoup investi ces dernières années dans la digitalisation de ses formations. La plate-forme www.tpdemain.com réunit aujourd’hui des milliers de contenus pédagogiques, des vidéos et des parcours clés en main pour les apprenants et les formateurs. Parmi les thématiques proposées, nous avons mis l’accent sur la santé et la sécurité avec la mise à disposition de six parcours dédiés, librement accessibles : le kit prévention, l’autorisation de conduite, l’autorisation d’intervention à proximité (AIPR) pour les opérateurs et les encadrants.