Que s’est-il passé ?

    Arrêt de la Cour de cassation, civile, chambre sociale, 2 mai 2024, n°21-14.828

    Une salariée a été placée en arrêt de travail pendant plusieurs mois en 2015 dans le cadre d’un accident du travail, puis en arrêt de travail jusqu’en 2017.

    La Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) a refusé de prendre en charge cet accident au titre de la législation professionnelle. La salariée a alors saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale (juridiction judiciaire compétente jusqu’en 2019 pour reconnaître ou non un accident du travail), qui a jugé que cet accident devait être pris en charge comme accident du travail.

    Le lendemain de l’accident, la salariée avait déposé une main courante à l’encontre du président de l’association dans laquelle elle était employée, suivie d’un dépôt de plainte pour des faits de harcèlement. La salariée avait également envoyé une lettre à son employeur dénonçant ces mêmes faits de harcèlement moral et sexuel. Quelques semaines plus tard, un rappel à la loi a été notifié au président de l’association mis en cause pour « violences psychologiques/harcèlement » et la salariée a saisi la juridiction prud’homale pour demander la résiliation de son contrat de travail.

    À l’issue de sa visite de reprise, la salariée a été déclarée inapte par le médecin du travail avec dispense de recherche de reclassement. La salariée a, par la suite, été licenciée pour ce motif.

    L’employeur est condamné par la cour d’appel à verser des dommages-intérêts à la salariée, notamment pour manquement à son obligation de sécurité et pour licenciement nul. Il forme alors un pourvoi qui est rejeté par la Cour de cassation.

    Pourquoi cette décision ?

    Pour contester sa condamnation, l’employeur fait valoir que les faits de harcèlement sexuel allégués par la salariée, commis par un autre membre de l’entreprise, relevaient en l’espèce de la sphère privée de la salariée, raison pour laquelle il n’avait pas eu de réactions après la dénonciation de faits de harcèlement telles que diligenter une enquête et mettre en œuvre une mesure disciplinaire.

    L’employeur estime en effet que dans la mesure où les faits ont été commis exclusivement en dehors de l’entreprise et du temps de travail, cela l’exonérait de mettre en œuvre les mesures de prévention d’actes de harcèlement prévues à l’article L1153-5 du Code du travail.

    Il estime également que le fait que la salariée ait été en arrêt de travail au moment où elle a dénoncé les faits de harcèlement sexuel, et jusqu’à son licenciement, avait eu une incidence sur les mesures qu’il pouvait prendre en réponse à ses plaintes.

    La Cour de cassation rejette les arguments avancés par l’employeur.

    Elle rappelle, dans un premier temps, que les faits de harcèlement sexuel commis envers la salariée n'étaient pas détachables de la vie professionnelle. En ne mettant en œuvre aucune mesure de prévention du harcèlement, et en ne diligentant aucune mesure à la suite de la dénonciation des faits de harcèlement sexuel qu’avait réalisé la salariée en adressant une lettre à son employeur, ce dernier avait violé son obligation de prévention du harcèlement sexuel.

    La Cour précise également que le fait que la salariée soit en arrêt de travail au moment de la dénonciation des faits, et que les faits de harcèlement sexuel aient donné lieu à une enquête préliminaire suivie d'un rappel à la loi, était inopérant.

    Commentaire

    L’arrêt rendu par la Cour de cassation rappelle que l’employeur doit respecter son obligation de prévention du harcèlement sexuel dès lors qu’est porté à sa connaissance le comportement déplacé d’un salarié à l’égard d’un autre avec qui il est en contact en raison de son travail, peu importe que les faits allégués se soient produits en dehors du lieu et du temps de travail.

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