Expertise intérim en entreprise utilisatrice
Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale du 26 février 2020 - n°18-22.556.
Date du texte : 26 févr. 2020
Le CHSCT de l’entreprise de travail temporaire peut, en cas de risque grave pour les intérimaires, diligenter une expertise au sein de l’entreprise utilisatrice. Cela suppose que cette dernière et son CHSCT aient été inactifs face à un risque avéré.
QUE S’EST-IL PASSÉ ?
Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) d’une entreprise de travail temporaire (ETT) vote une expertise concernant des intérimaires mis à disposition d’une entreprise utilisatrice (EU). Il invoquait un risque grave pour leur santé et l’inaction de l’entreprise utilisatrice. L’ETT conteste cette délibération, y voyant une immixtion dans la gestion de l’EU, violant sa liberté d’entreprendre. Elle considérait également que c’est à l’EU et à son CHSCT de se préoccuper de la santé et de la sécurité des travailleurs mis à sa disposition. La Cour de cassation censure le refus de principe des juges du fond de la possibilité pour le CHSCT de l’ETT de désigner un expert.
POURQUOI CETTE DÉCISION ?
La Cour de cassation fonde sa décision sur la protection des travailleurs intérimaires, assurée par plusieurs textes européens transposés en droit français*, mais également sur le Préambule de la Constitution de 1946 (article 11) qui a valeur constitutionnelle, et qui dispose que la Constitution «[…] garantit à tous, […], la protection de la santé, […]».
COMMENTAIRE
La Cour de cassation déduit de ces textes, pour la première fois, une exigence constitutionnelle du droit à la santé des travailleurs. Elle reconnaît la possibilité pour le CHSCT (transposable au CSE) de diligenter une enquête si :
- est avéré un risque grave et actuel pour les intérimaires ;
- est constatée l’inaction de l’entreprise utilisatrice et de son institution représentative du personnel en charge des questions de santé et sécurité.
* Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, Directive 89/391 du 12/06/1989 sur la sécurité et la santé des travailleurs