Que s'est-il passé ?

    Arrêt de la Cour de cassation, 2e chambre civile, 1er juin 2023, n°21-22.303

    Un salarié embauché en tant que manœuvre intérimaire est victime d’une chute alors qu’il intervenait au sein d’une entreprise utilisatrice (EU). L’accident a été pris en charge par la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) au titre de la législation professionnelle.

    Le salarié a, par la suite, saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale afin de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur, l’entreprise de travail temporaire (ETT).

    La cour d’appel a reconnu la faute inexcusable de l’ETT et de l’EU. La faute inexcusable de l’EU ayant également été reconnue, cette dernière a été condamnée par les juges à verser à la victime une provision de 3 000 euros à valoir sur l'indemnisation à venir de ses préjudices.

    L’arrêt rendu par la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel. La Cour de cassation rappelle que lorsqu’un accident du travail d’un salarié intérimaire est imputable à l’EU, il appartient à la CPAM d’indemniser directement la victime, puis de récupérer le montant auprès de l’employeur, l’ETT. Il appartient ensuite à l’ETT d’engager une action en remboursement à l’encontre de l’EU également condamnée. 

    Pourquoi cette décision ?

    La faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice ayant en l’espèce été reconnue, la cour d’appel avait condamné cette dernière à verser directement à la victime une provision à valoir sur l’indemnisation à venir de ses préjudices.

    Pour contester cette décision, l’EU faisait valoir qu’en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, les sommes dues à la victime sont toujours versées directement à la victime par la CPAM. Il appartient à la CPAM d’en récupérer ensuite les montants auprès de l’employeur (articles L452-2 et L452-3 du Code de la sécurité sociale), qui ne peut se voir condamné à payer directement les sommes dues au salarié. L'accident du travail étant en l’espèce imputable à la faute inexcusable de l’EU et de l’ETT, il appartenait selon elle à l’ETT, en sa qualité d'employeur de la victime, d’exercer une action en remboursement contre l’EU.

    La Cour de cassation donne raison à l’EU. Bien que la faute inexcusable de l’EU soit reconnue, cette dernière n’aurait en l’espèce pas dû être condamnée à verser de provision au salarié. Il appartenait à la CPAM de l’indemniser directement, et de récupérer ensuite les montants auprès de l’ETT.

    Commentaire

    En cas de recours à un salarié intérimaire, le chef de l’entreprise utilisatrice est responsable des conditions d’exécution du travail du salarié pendant sa mission (article L1251-21 du Code du travail). Ces conditions d’exécution du travail comprennent notamment la santé et la sécurité au travail.

    Par conséquent, en cas d’accident du travail, la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice peut être retenue par les juges s’il est établi qu’elle avait conscience du danger et qu’elle n’a pas pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié de l’accident.

    Cet arrêt rappelle la procédure d’indemnisation applicable en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’EU : il appartient à la CPAM d’indemniser directement la victime, puis de récupérer les montants à l’employeur (article L412-6 du Code de la sécurité sociale). Charge à l’ETT de se retourner ensuite contre l’EU pour obtenir le remboursement des sommes dues par celle-ci (articles L452-2 et L452-3 du Code de la sécurité sociale). 

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