Faute inexcusable et indemnisation du déficit fonctionnel permanent
La rente ou l'indemnité en capital versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle n’a pas pour objet d’indemniser le déficit fonctionnel permanent. En cas de faute inexcusable de son employeur, la victime peut donc lui demander également la réparation de ce préjudice.
Date du texte : 16 mai 2024
Cass. Civ. 2e, 16 mai 2024, n°22-23.314
Un salarié, victime d’un accident du travail, demande la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ainsi que l’indemnisation du déficit fonctionnel permanent causé par l’accident.
La cour d’appel rejette la demande d’indemnisation du salarié au motif que ce préjudice serait déjà compris dans la rente qui lui est versée au titre de son accident de travail. Elle considère en effet que cette rente indemnise les pertes de gains professionnels, l'incidence professionnelle de l'incapacité ainsi que le déficit fonctionnel permanent.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel.
La Cour de cassation rappelle que la rente ou l'indemnité en capital versée à la victime d'un accident du travail (AT) ou d’une maladie professionnelle (MP) ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.
En effet, en cas de faute inexcusable de l’employeur, le salarié victime d’un AT/MP a le droit de demander à celui-ci la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément, ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.
Cette réparation est indépendante et distincte de la majoration de la rente (versée lorsque la victime est atteinte d’une incapacité permanente d’au moins 10 %) que la victime perçoit lorsque la faute inexcusable de l’employeur est reconnue.
Cet arrêt s’inscrit pleinement dans le revirement de jurisprudence opéré par la Cour de cassation dans son arrêt du 20 janvier 2023. Désormais, les victimes d’un AT/MP consolidé peuvent percevoir, en complément de leur rente, une indemnité distincte, correspondant aux souffrances physiques et morales (déficit fonctionnel permanent) dès lors que la faute inexcusable de leur employeur est reconnue.