Harcèlement et prise d'acte : responsabilité du chef d'entreprise
Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 11 mars 2015 - n°13-18603
Date du texte : 11 mars 2015
« L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation lorsqu'un salarié est victime sur le lieu de travail d'agissements de harcèlement moral ou sexuel exercés par l'un ou l'autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures pour faire cesser ces agissements ».
QUE S’EST-IL PASSE?
Une salariée est victime d'un harcèlement moral et sexuel dans l'entreprise de juin 2009 à novembre 2009. Dès la dénonciation, une enquête a été réalisée et le chef d’équipe à l’origine du harcèlement est licencié. En février 2010, la salariée communique un arrêt de travail pour « état anxio dépressif réactionnel à de gros problèmes liés au travail ». En octobre 2010, elle prend acte de la rupture de son contrat de travail.
Pour son employeur et la Cour d’appel, cette prise d’acte devait produire les effets d’une démission dans la mesure où l’employeur n'a eu connaissance du harcèlement sexuel et moral commis par son préposé qu'avec la dénonciation qui lui en a été faite et il a d’ailleurs aussitôt pris les mesures appropriées et sanctionné l'auteur. Il en déduit alors qu’il a pris les mesures nécessaires à la protection de la salariée et qu'il n'a pas manqué à son obligation de sécurité.
POURQUOI CETTE DECISION?
La Cour de Cassation vient contredire le raisonnement de la Cour d’appel sans se prononcer sur le bien-fondé de la prise d’acte. Elle considère qu’il appartient aux juges, dans un premier temps, de rechercher l’existence d’un manquement de l’employeur. Si un manquement est soulevé (en l’espèce les faits de harcèlement), l’employeur est responsable et manque à son obligation de sécurité de résultat, peu importe qu’il ait immédiatement remédié à la situation.
Dans un second temps, il leur appartient d'apprécier si ce manquement a empêché la poursuite du contrat de travail.
COMMENTAIRE
Lorsqu’un salarié fait état de manquement de la part de l’employeur, ce dernier viole son obligation de sécurité. Toutefois pour que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement il faut apprécier si ces manquements sont suffisamment graves pour rompre la poursuite du contrat de travail.