Que s’est-il passé ?

    Arrêt de la Cour de cassation, Chambre sociale  22.19401, 24 avril 2024

    Une salariée est placée en arrêt de travail en février 2013, puis déclarée inapte à son poste à l’issue de deux visites de reprise en septembre et octobre 2015. Elle est licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement en décembre 2015.

    Elle saisit le Conseil des Prud’hommes en mai 2016 estimant que son licenciement pour inaptitude résulte directement du manquement de son employeur à son obligation de sécurité.

    La cour d’appel déclare irrecevable ses demandes basées sur les manquements de son employeur à son obligation de sécurité. Pour la cour d’appel, le point de départ du délai de prescription de l’action de 2 ans, c’est-à-dire du délai maximum pour faire une demande en justice, est la date de l’arrêt de travail de la salariée. La cour estime donc que le délai de 2 ans pour agir en justice a commencé à courir en février 2013, les faits dont elle se prévaut sont donc prescrits depuis février 2015.

    L'article L1471-1 du Code du travail, issu de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi et applicable en l’espèce, prévoit que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

    La cour d’appel retient que la salariée avait nécessairement connaissance des manquements à l'obligation de sécurité de son employeur à la date de son arrêt de travail, soit en février 2013.

    La salariée forme un pourvoi en cassation considérant qu’à la date de son arrêt maladie elle n’avait pas connaissance des manquements de son employeur à son obligation de sécurité et donc que ce n’est pas à cette date que le délai de prescription de l’action a commencé à courir.

    La Cour de cassation dans cet arrêt juge que la demande de la salariée est recevable et casse l’arrêt de la cour d’appel.

    Pourquoi cette décision ?

    La Cour de cassation, dans sa décision du 24 avril 2024, rappelle que le point de départ du délai de prescription de l'action par laquelle un salarié déclaré inapte à son poste sollicite la réparation des manquements à l'obligation de sécurité est la date à laquelle le salarié a eu connaissance des incidences sur sa santé des agissements de l'employeur.

    Pour la Cour de cassation, ce point de départ ne peut pas être antérieur à la date de la déclaration d'inaptitude, soit en décembre 2015, et ne peut donc pas être la date de l’arrêt de travail. En effet, avant la date de prononcé de l’inaptitude par le médecin du travail, le lien entre travail et état de santé n’était pas médicalement établi, et ne pouvait donc pas être imputé à l’employeur.

    Ainsi la Cour de cassation juge que la demande d’indemnisation de la salariée est recevable.

    Commentaire

    La Cour de cassation avait déjà jugé qu’un licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsqu'il est démontré que l'inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée (Soc., 3 mai 2018).

    Elle rappelle ici que lorsqu'un salarié conteste, dans le délai imparti, son licenciement pour inaptitude, il est recevable à invoquer le moyen selon lequel l'inaptitude est la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Elle précise surtout que le point de départ du délai de prescription de l’action par laquelle un salarié déclaré inapte à tout poste de travail sollicite réparation de la rupture de son contrat de travail, et donc des manquements à l’obligation de sécurité de l’employeur qui, selon lui, sont responsables de son inaptitude, est la date de la déclaration d’inaptitude, et non la date de l’arrêt de travail, ce qui est plus favorable aux intérêts du salarié.

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