Que s’est-il passé ?

    Arrêt de la Cour de cassation, chambre criminelle, 23 janvier 2024, n°23-81.091

    Deux salariés d’une entreprise (dite entreprise extérieure – EE) ont été blessés lorsqu’ils travaillaient sur un site industriel exploité par une entreprise (dite entreprise utilisatrice – EU).

    Le tribunal correctionnel condamne l’entreprise utilisatrice :

    • Pour infractions à la réglementation sur l’hygiène et la sécurité des travailleurs, et plus précisément pour exécution de travaux par une entreprise extérieure sans plan de prévention des risques préalables conforme, et pour avoir permis l’exécution de travaux par une entreprise extérieure sans information préalable des salariés de l’entreprise extérieure sur les risques ;
    • Et à payer des contraventions pour blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail d’une durée inférieure ou égale à trois mois.

    L’arrêt rendu par la cour d’appel confirme le jugement du tribunal correctionnel. L’entreprise utilisatrice conteste la décision et forme un pourvoi en cassation.

    La Cour de cassation confirme la condamnation de l’entreprise utilisatrice pour n’avoir pas respecté les obligations relatives à l’établissement du plan de prévention prévues par le Code du travail. En revanche, elle conteste le raisonnement adopté par la cour d’appel pour conclure à la condamnation de l’entreprise utilisatrice.

    Pourquoi cette décision ?

    Afin de confirmer la condamnation de l’entreprise utilisatrice pour avoir permis la réalisation de travaux par une entreprise extérieure sans plan de prévention conforme à la réglementation, les juges de la Cour de cassation rappellent que les salariés de l’entreprise extérieure étaient intervenus sur des canalisations préalablement vidangées « mais contenant un résidu semi-solide susceptible de se liquéfier sous l'effet d'une source de chaleur telle que les disques de tronçonnage utilisés pour l'intervention ».

    Or le plan de prévention établi par les entreprises ne prévoyait pas les risques liés à la présence de tels produits, ni les EPI que les travailleurs auraient dû porter pour les protéger de tout risque de projection.

    Les juges confirment alors la partie du raisonnement adopté par la cour d’appel qui a considéré l’entreprise utilisatrice pénalement responsable en raison de l'absence d'évaluation et de prévention du risque de présence de produits toxiques dans les tuyaux. Ils précisent également que l’éventuelle faute commise par l’entreprise extérieure ne permettait pas à l’entreprise utilisatrice de s’exonérer de sa responsabilité concernant l’établissement du plan de prévention.

    La Cour de cassation confirme alors que les manquements commis par l’entreprise utilisatrice constituent une violation des articles R. 4512-6 et suivants du Code du travail relatifs à l’établissement du plan de prévention.

    Par ailleurs, la cour d’appel avait retenu la culpabilité de l’entreprise utilisatrice pour ne pas avoir fourni aux salariés de l’entreprise extérieure d’information préalable sur les risques engendrés par l’opération, car le risque de projections de produits chimiques n'avait été ni identifié, ni évalué.

    Or l’article R4512-15 du Code du travail fait peser cette obligation d’information préalable sur l’entreprise extérieure, et non sur l’entreprise utilisatrice.

    Par conséquent, la Cour de cassation considère que la cour d’appel, aurait dû rechercher si les manquements reprochés pouvaient éventuellement relever d'une autre qualification imputable à l'entreprise utilisatrice.

    Commentaire

    En rappelant qu’un plan de prévention non conforme à la réglementation est susceptible d’engager la responsabilité pénale de l’entreprise extérieure et de l’entreprise utilisatrice, cet arrêt s’inscrit dans la lignée d’un arrêt du 4 avril 2023, qui avait rappelé que l’absence d’inspection commune préalable à l'exécution d’une opération par une entreprise extérieure est une infraction à la réglementation sur l'hygiène et la sécurité des travailleurs pouvant entraîner la responsabilité aussi bien de l’entreprise utilisatrice que de l’entreprise extérieure.

    En revanche, comme le rappelle l’arrêt du 24 janvier 2024, l’obligation d’information préalable prévue par l’article R4512-15 du Code du travail repose exclusivement sur l’entreprise extérieure. Le manquement à cette obligation ne peut être reproché à l’entreprise utilisatrice.

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