En résumé

● L’invalidité n’est pas forcément associée à un arrêt complet de l’activité.
● Couplée à un aménagement de poste, elle peut permettre d’éviter la mise en inaptitude.

Article paru dans PréventionBTP n°293-Mars 2025-p. 30.

« Mais je ne suis pas handicapé ! » Une telle réaction peut survenir lorsque le médecin du travail prononce le mot « invalidité ». Handicap et invalidité sont des mots qui font peur. Et pourtant, dans certains cas, la mise en invalidité peut être le meilleur moyen de protéger un salarié et lui permettre de poursuivre une activité professionnelle. En pratique, comment cela se passe-t-il ? La plupart du temps le salarié est en arrêt maladie d’assez longue durée. « Je propose une visite de préreprise pendant l’arrêt afin d’avoir le temps d’évaluer son état de santé, identifier les aménagements de poste nécessaires, et accompagner l’entreprise et le salarié dans les démarches de maintien dans l’emploi », indique le Dr Nathalie Aunoble, médecin du travail à l’AHI33. Une reprise progressive de l’activité au poste de travail ou à un autre poste dans l’entreprise, dans le cadre d’un temps partiel thérapeutique ou d’un essai encadré (lire l'article paru dans PréventionBTP n° 278, p. 23) peut aider à remettre le pied à l’étrier. Mais, parfois, l’état de santé du salarié laisse mal augurer un retour, à terme, à une activité à temps plein. C’est là que la proposition de la mise en invalidité va faire sens. L'invalidité est évaluée par le médecin-conseil de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). Elle n’empêche pas la reprise du travail, mais elle permet d’aménager le poste de travail en adéquation avec la santé et la capacité de travail du salarié. Auparavant, ces salariés étaient le plus souvent mis en inaptitude avec un risque majeur de désinsertion professionnelle.

Maintenir une activité professionnelle

Cancers, greffes, maladies cardiovasculaires, maladies inflammatoires, de nombreuses situations peuvent conduire à une invalidité. Parmi des exemples de réussite dans le cadre d’une invalidité de catégorie 1 ou 2, ce compagnon victime d’une affection cardiaque contre-indiquant le port de charge et les gestes répétitifs. « Il avait son CACES, il est devenu chauffeur d’engins de chantier trois jours par semaine » ou encore ce chef de chantier, lui aussi affecté par un trouble cardiovasculaire. « Il exerçait dans une entreprise de TP d’environ 180 personnes, raconte la médecin du travail. Aujourd’hui, il poursuit son activité mais comme tuteur à temps partiel. Il forme les jeunes chefs de chantier, il encadre les apprentis… ». La réussite dépend de la capacité du médecin et de l’entreprise de trouver un poste à la mesure du salarié, ainsi que de sa motivation à conserver une activité professionnelle en adéquation avec son état de santé. Ce fut le cas par exemple pour ce salarié greffé rénal. Formé à la logistique, il est désormais magasinier à mi-temps dans le cadre d’une invalidité catégorie 2 (lire ci-dessous). « C’est une personne dotée d’une très grande expérience des métiers du BTP, il sait fournir aux équipes le bon matériel au bon moment… », indique le Dr Nathalie Aunoble. Le salarié travaille en duo avec un autre compagnon, lui aussi en invalidité, à la suite d'un cancer.

Invalidité ou inaptitude ?

Ces deux concepts, totalement différents, sont pourtant souvent confondus. – L’invalidité est décidée par le médecin-conseil de la Sécurité sociale. Elle indique que l’état de santé d’une personne limite ses capacités à travailler. Selon la gravité de la maladie, l’invalidité sera de catégorie 1, 2 ou 3.
Les catégories 1 ou 2 peuvent occuper un poste (le plus souvent à temps partiel) pour lequel le médecin du travail les aurait déclarés aptes. – L’aptitude est décidée par le médecin du travail. Elle concerne un poste spécifique. Le salarié peut être inapte à un poste mais apte à un autre poste.
Il peut également être apte à un poste sous réserve de certaines restrictions (par exemple le port de charges). Il peut enfin être en invalidité…. mais apte
à certains postes aménagés.

4 clés pour réussir l’intégration d’un salarié en invalidité

293 Santé - En invalidité… mais apte

Anticiper la reprise !

Pour tout arrêt de travail de plus d’un mois, le salarié peut bénéficier d’une visite de préreprise durant laquelle le médecin du travail évalue ses capacités à reprendre son poste et les aménagements nécessaires avec l’entreprise. Le cas échéant le médecin peut activer la cellule Prévention de la désinsertion professionnelle pour trouver des solutions financières, organisationnelles et sociales.

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Avoir une bonne connaissance des postes de travail

Pour trouver le bon compromis, le médecin doit bien connaître l’entreprise – aussi bien ses métiers, que son organisation et son management. Il peut alors mobiliser les intervenants autour du salarié et activer le Fipu et l’Agefiph pour aider à financer l’aménagement du poste. L’entreprise est l'un des partenaires essentiels du maintien en emploi.

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Dialoguer est indispensable

La qualité de la relation entre le médecin du travail et le salarié est essentielle à la réussite. Le plus souvent le compagnon ne veut pas s’arrêter, il redoute la mise en invalidité et l’inaptitude. Tout l’art du médecin sera d’entendre ses craintes, de bien évaluer ses envies, ses compétences, et de lui faire comprendre que dans son cas la mise en invalidité peut être une chance à saisir.

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Avoir conscience que tout le monde est gagnant

Avec la reprise d’une activité adaptée dans le cadre d’une invalidité, tout le monde est gagnant : l’entreprise, qui conserve des compétences ; le salarié, qui maintient un lien social et cumule une pension d’invalidité (partielle) et une rémunération ; la société au sens large, qui évite la sortie de ces salariés du marché du travail.

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