Risque routier, comment préserver sa vigilance ?
Les accidents routiers au travail sont la deuxième cause de décès en mission dans le BTP. Le plus souvent, ils sont dus à un défaut de vigilance. Des mesures simples pourraient les éviter.
Date de mise à jour : 29 juil. 2024 - Auteur : Cendrine Barruyer
● La somnolence et les troubles de la vigilance sont une cause majeure d’accidents routiers.
● Alcool, drogue, médicaments, mais aussi tous les « distracteurs d’attention ».
Article paru dans PréventionBTP n°286-Juillet-Août 2024-p. 30.
Zéro risque routier dans le BTP. La campagne, lancée pour la première fois en 2022 par l’OPPBTP, a débuté cette année le 27 mai, pour se poursuivre jusqu'au 21 juin. Objectif : sensibiliser les différents acteurs à ce risque qui représente la deuxième cause de décès dans le BTP, après les chutes de hauteur pour les accidents de mission, et la première cause si l’on inclut les accidents de trajet. De nombreux facteurs expliquent la fréquence de ces accidents, au premier rang desquels, les troubles de la vigilance. « La conduite est l'une des activités les plus techniques pour l’être humain. On mobilise simultanément les quatre membres, le champ visuel devant soi, sur les côtés et derrière soi. Il faut être attentif à un certain nombre d’avertisseurs, anticiper les actions des autres conducteurs. Tout cela demande une belle attention », indique Maël Mesmeur, infirmier en santé au travail et référent risque routier pour l’Amebat. La concentration peut être affectée de différentes manières. La plus connue : l’alcool et les drogues. Ils amputent le champ visuel, altèrent la perception des reliefs, la coordination des mouvements, diminuent les capacités d’analyse, augmentent le temps de réaction et la sensibilité à l’éblouissement. Selon la Sécurité routière, l’alcool est responsable de 30 % de la mortalité routière. Un taux de 0,5 g d’alcool dans le sang (environ deux verres) multiple par deux le risque d’accident, tout comme le cannabis. L’association alcool-cannabis accroît d’un facteur 15 la probabilité de survenue d’un accident. Quid de la consommation dans le BTP ? « Pour l’alcool, on observe des progrès. La drogue est en revanche en net accroissement », alerte David Constans, président du club Sécurité routière en entreprise du Finistère (SRE29). D’autres formes d’altération de la vigilance sont moins connues. C’est le cas des médicaments. Depuis 1999, les molécules affectant la conduite automobile et a fortiori celle d’engins de chantiers sont repérables par un triangle, de couleur jaune : le risque est faible, orange : le risque est modéré, il faut en discuter avec son médecin traitant et/ou le médecin du travail, rouge : la conduite sous l’influence de ce médicament est dangereuse (vertiges, somnolence), 5 % des médicaments le portent.
Gare aux distracteurs !
Tout ce qui favorise la somnolence est facteur d’accident routier (horaires décalés, apnées du sommeil, chaleur, déshydratation, repas copieux…). Garer son véhicule à l’ombre, utiliser la climatisation, boire régulièrement, manger sainement, sont ainsi des moyens simples de lutter contre le risque routier. Et pour les travailleurs de nuit ? « Quinze minutes de sieste ou au contraire une petite marche pour se stimuler avant de prendre le volant sont une bonne option », conseille Maël Mesmeur. Enfin, le nombre de distracteurs (GPS, montre connectée, téléphone…) est en croissance exponentielle. Ce risque doit être régulièrement mentionné lors des quarts d’heures sécurité. La mise en place d’un protocole pour l’utilisation de ces dispositifs est indispensable.
Juillet 2024, une date clé
À partir du 7 juillet 2024 l’adoption en Europe du General Safety Regulation 2 (GSR 2) conduira tout véhicule neuf à disposer de freinage automatique, de système de maintien dans la voie, d’assistance intelligente à la vitesse mais également de caméra embarquée connectée détectant des signes de fatigue ou de somnolence. Cela permettra-t-il de réduire l’accidentologie ? Sans doute. Attention toutefois alerte Maël Mesmeur, « ces innovations techniques risquent de rassurer à l’excès les conducteurs et les amener à diminuer leur vigilance au volant », de la même manière que les kits mains libres et les commandes vocales ont conduit bien des salariés à participer à des visioconférences… tandis qu’ils conduisaient !
4 précautions indispensables pour rester vigilant
Détecter les signes de fatigue
Bailler, avoir la nuque enraidie, bouger sans cesse sur son siège, avoir le regard fixe et les yeux qui picotent sont autant de signes de fatigue. Si ces signes surviennent, il ne faut pas lutter, mais s’arrêter et prendre le temps de se reposer (15 minutes de sieste puis quelques pas pour se redynamiser). Attention aux heures à risque accru d’endormissement (13 h 00 à 15 h 00, et 2 h 00 à 5 h 00 du matin).
Ne pas décrocher en conduisant un véhicule ou un engin
Téléphoner au volant multiplie par trois le risque d’accident. Même avec un kit mains libres, l’attention est dispersée par un appel. Il est indispensable de mettre en place un protocole de communication indiquant aux salariés les moments où le téléphone doit être sur messagerie, les modalités de réglage du GPS (à l’arrêt !), les actions à réaliser en cas d’appel urgent…
Informer le médecin du travail ou l'infirmier santé au travail des traitements suivis
De nombreux médicaments peuvent entraîner des épisodes de somnolence. Pour David Constans, président du Club Sécurité Routière en Entreprise du Finistère, l’entreprise doit développer de l’empathie afin que le salarié se sente en mesure d’indiquer au médecin du travail s’il suit des traitements incompatibles avec la conduite d’engins ou de véhicules.
Bannir la consommation d'alcool et de drogue
Seuls ou en association, l’alcool et la drogue affectent dramatiquement la vigilance. Des formations et des jeux sont disponibles pour sensibiliser les salariés au risque, notamment des lunettes qui simulent la vision lorsqu’on est sous l’emprise de ces substances. C’est bluffant !