Que s’est-il passé ?

    Arrêt de la Cour de cassation, 2e Chambre civile, 22 mai 2024, n°23-82.621

    Un salarié a été grièvement blessé par la chute de panneaux de treillis soudés transportés par un chariot élévateur.

    Le jour même de l’accident, lors de l’audition du conducteur de chariot, qui était également l’employeur de la victime, ce dernier a déclaré :

    • Avoir décidé de déplacer les treillis afin de les ranger à un endroit plus adapté ;
    • Avoir utilisé des sangles souples en tissu déjà utilisées et soumises aux intempéries depuis trois semaines, tout en sachant qu'elles étaient à usage unique ;
    • Avoir utilisé ces sangles sans avoir vérifié préalablement leur état.

    Après enquête des services de gendarmerie et de l’Inspection du travail mettant en avant les manquements commis, l'employeur a été poursuivi pour blessures involontaires.

    Le tribunal correctionnel déclare le conducteur/employeur coupable du délit de blessures involontaires. L’arrêt rendu par la cour d’appel confirme le jugement rendu par le tribunal correctionnel et le condamne pour blessures involontaires par violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.

    Pour contester cette décision devant la Cour de cassation, le conducteur de chariot/employeur de la victime fait notamment valoir que les critères requis pour caractériser l'infraction qui lui était reprochée (blessures involontaires par violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement) n’étaient pas remplis.

    La Cour de cassation a jugé que les obligations applicables aux engins de levage de charges prévues par le Code du travail constituaient bien des obligations particulières de prudence ou de sécurité et que la violation de ces obligations par le conducteur/employeur était en l’espèce manifestement délibérée. Le pourvoi a donc été rejeté dans son intégralité.

    Pourquoi cette décision ?

    Les articles R4323-34 et R4323-47 du Code du travail prévoient l’obligation pour l’employeur de choisir et d’utiliser des accessoires de levage en fonction des charges à manutentionner, des points de préhension, du dispositif d'accrochage et des conditions atmosphériques et compte tenu du mode et de la configuration d'élingage.

    L’employeur faisait valoir que ces deux articles du Code du travail ne prévoient pas d'obligation particulière de prudence ou de sécurité, et qu’ils rappellent simplement, de façon générale, des principes de protection applicables au levage des charges, ce qui le laissait libre d'apprécier les moyens à mettre en œuvre pour respecter ces dispositions.

    La Cour de cassation rejette cet argument, et confirme que ces articles du Code du travail édictent, à la charge de l'employeur, des obligations particulières de sécurité, objectives, immédiatement perceptibles et clairement applicables, sans faculté d'appréciation personnelle de l’employeur.

    De plus, les juges retiennent que le conducteur de chariot/employeur avait lui-même admis, lors de son audition, que les élingues utilisées lors de la manœuvre accidentogène n'étaient pas adaptées aux travaux effectués, et avoir donc choisi un matériel qui ne permettait pas d'empêcher une chute de la charge.

    Par conséquent, la Cour de cassation considère que le recours par l’employeur à des accessoires de levage sans s'être assuré préalablement qu’ils étaient adaptés à l’usage prévu constitue le caractère délibéré de la violation de l’obligation qu’il lui appartenait de respecter.

    Commentaire

    Pour assurer la sécurité des opérateurs et de toute personne située à proximité, l’employeur doit réaliser des vérifications réglementaires des appareils et accessoires de levage utilisés par les salariés (articles R4323-22 et suivants du Code du travail).

    L’arrêté du 1er mars 2004 relatif aux vérifications des appareils et accessoires de levage précise la périodicité de ces vérifications ainsi que leur nature et leur contenu. Il impose notamment à l’employeur d'effectuer une vérification périodique des accessoires de levage tous les 12 mois afin de vérifier leur bon état de conservation et de déceler toute détérioration susceptible d’être à l’origine de situations dangereuses.

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