Pauses actives, un nouvel outil au service de la prévention
Comment se décontracter de la manière la plus efficace ? C’est l’objet des pauses actives qui ont fait récemment leur apparition sur les chantiers. Tour d’horizon de quelques expériences.
Date de mise à jour : 26 juin 2024 - Auteur : Cendrine Barruyer
● Les pauses actives sont des temps courts visant à prendre du recul sur la tâche accomplie et préparer la suivante.
● Elles doivent s'intégrer dans une stratégie globale de prévention.
Article paru dans PréventionBTP n°285-Juin 2024-p. 32.
Trois minutes de détente destinées à favoriser la récupération musculaire et prévenir l’apparition de douleurs, c’est le principe de la pause active. Chez Bouygues bâtiment France, plusieurs initiatives ont été prises dans ce sens. Dans certaines entités, des « ateliers de la santé » sont consacrés à cette thématique. Diverses vidéos tournées sur les chantiers sont montrées aux compagnons pour leur faire découvrir les muscles les plus sollicités lors de leurs différentes activités. On leur explique aussi la différence entre les échauffements du matin (éveil musculaire) et la pause active, réalisée pendant le temps de travail. La pause active s’adapte au compagnon, à la tâche qu’il vient d’effectuer, au programme de sa journée… Quand faut-il les faire ? Quand on en ressent le besoin, au milieu d’une tâche ou entre deux tâches, pour se reposer de la précédente, prendre du recul et préparer la suivante, ou encore à horaires réguliers. Au-delà des bénéfices immédiats pour le salarié, la pause active semble être un outil intéressant pour améliorer la qualité du travail réalisé (lire l'encadré). Parfois une tâche brève mais très sollicitante va nécessiter des pauses plus fréquentes. « Si le compagnon travaille bras en l’air, il aura besoin de soulager son épaule, même si cela n’a duré que vingt minutes », note la préventrice en sécurité de Bouygues
Habitat social, Hanaa Ahamada. Autre initiative intéressante, l’intervention d’un coach sur un chantier à Maisons-Alfort (Val-de-Marne). « Pendant trois mois, il est venu chaque semaine sur le chantier. Il échangeait avec les compagnons, prodiguait des conseils personnalisés », indique Armelle Delas, responsable du pôle ergonomie de Bouygues bâtiment France. L’opération s’est terminée en décembre. « En avril, nous sommes retournés voir les compagnons. Nous avons constaté qu’ils réalisaient de vraies pauses actives durant la journée. Ils ont bien accroché avec ce système-là, car ils y ont vu leur intérêt… » Compagnon bancheur sur ce chantier, Marco Paulo Lopes en est convaincu. Il effectue régulièrement des pauses actives pour soulager ses épaules, ses bras et surtout ses poignets quand il sent son corps fatigué mais aussi en préventif à la pause déjeuner.
Deux types de pause active
« Il existe deux types de pause active, explique Maxime Gilot, collaborateur chez MyOsteo, organisme de formation à la prévention en santé, les pauses actives anatomiques visant à décontracter des zones du corps par exemple les épaules, les lombaires, les genoux, les cervicales et les pauses métiers. » Ces dernières sont des enchaînements de plusieurs mouvements adaptés à la tâche exécutée. Ainsi après avoir manié un marteau-piqueur, le collaborateur va détendre son cou et ses épaules, puis mobiliser son bras et son poignet, étirer ensuite l’ensemble de la colonne vertébrale et terminer par des flexions du pied. Pour la tronçonneuse thermique, qui sollicite d’autres groupes musculaires ou pour la pelle, les mouvements seront différents.
L’avis d'une ergonome
Caitlin Troussier, ergonome à l'OPPBTP, détaille les bénéfices de la pause active. Cette pratique est une carte de plus dans l’éventail des mesures aidant à prévenir les TMS, à condition de s’inscrire dans une démarche générale d’amélioration des conditions de travail. Au niveau de l’individu, la pause active lui permet de reprendre contact avec son corps. Au niveau de l’organisation, c’est un temps de prise de recul entre deux tâches : on peut observer la tâche effectuée, réfléchir à la suivante, l’anticiper au lieu de foncer tête baissée. Pendant ce temps, on peut aussi regarder autour de soi, observer ses collègues, voir si certains se mettent en danger. Cette prise de recul devrait être un atout majeur en matière de qualité et de sécurité.En savoir plus : l'OPPBTP a publié un mémo détaillant 14 exercices d'étirements à pratiquer pendant les pauses actives, disponible sur preventionbtp.fr.
4 rappels avant d’instaurer des pauses actives
Un outil intégré dans une stratégie globale
Les pauses actives doivent être intégrées dans une démarche globale de prévention de l’entreprise. Cette démarche passe d’abord par la transformation des conditions de travail et la réduction des contraintes physiques au travail et, dans un second temps seulement, par des mesures individuelles (échauffement, pause active…).
Des mouvements adaptés au port des EPI
Les mouvements (étirements automassages, respiration…) doivent être lents, contrôlés, prévus pour pouvoir être réalisés dans n’importe quel endroit et sans quitter ses EPI (casque, gants, lunettes, bouchons, chaussures…). La courte durée des exercices (deux à trois minutes), permet de les réaliser sans impacter l’organisation du chantier.
Des étirements mais pas seulement…
La pause active n’est pas seulement une série d’étirements. Elle permet aussi d’observer l’environnement, prendre du recul par rapport à la tâche effectuée, de prévisualiser le travail suivant. Si l’objectif premier est la prévention des tensions et des douleurs, ce temps peut aussi impacter favorablement la qualité du travail réalisé.
Un signal d’alerte à ne pas négliger
Les mouvements préconisés lors des pauses actives sont doux, lents et sans efforts. Si un geste est difficile à réaliser, s’il engendre une douleur, il ne faut pas négliger ce signal d’alerte. Le médecin du travail est le bon interlocuteur pour déterminer les mesures à prendre.