Vibrations, un risque mieux maîtrisé mais encore bien présent sur les chantiers
Les progrès en matière d'outillage et d’équipement ont permis de réduire l’exposition aux vibrations. Mais certains postes restent encore soumis à des contraintes fortes. Conseils pour mieux maîtriser ce risque.
Date de mise à jour : 11 sept. 2024 - Auteur : Cendrine Barruyer
● Deux millions de salariés sont exposés aux vibrations.
● Les dispositifs antivibratoires sont efficaces.
● La rotation des tâches est nécessaire sur certains postes.
Article paru dans PréventionBTP n°275-Juillet-Août 2023-p. 30
Scier, poncer, décaper, meuler, buriner, percer, creuser, pilonner, damer… ces activités soumettent le corps à des vibrations. Sans oublier la conduite d’engins, de chariots ou de camions. L’INRS estime à deux millions, tous secteurs confondus, le nombre de salariés exposés. Selon le type de vibration (haute ou basse fréquence…) et les parties du corps concernées – l’intégralité de l’appareil locomoteur (corps entier) ou une partie précise (mains-bras) –, l’impact sur la santé sera différent. Les vibrations peuvent entraîner des troubles ostéo-articulaires des membres supérieurs (tendinites des coudes, épaules, poignets…), des troubles neuropathiques et vasculaires (fourmillements, perte de sensibilité, syndrome de Raynaud(1)…) et des atteintes du rachis (sciatique ou cruralgie par hernie discale). Ces affections sont répertoriées dans les tableaux de maladies professionnelles nos 69 et 97.
Des cofacteurs à ne pas négliger
Les postures inconfortables, les efforts inadaptés de préhension ou de poussée, le port de charges, fragilisent l’appareil locomoteur et aggravent les douleurs et usures articulaires dues aux vibrations. Le froid et l’humidité sont susceptibles de déclencher un syndrome de Raynaud. Des voies de circulation mal entretenues sur le chantier ainsi que l’utilisation d’un engin à la suspension défectueuse aggravent la transmission des vibrations. Il est donc important de limiter tous ces cofacteurs.
Organiser les tâches
Organiser le chantier pour minimiser les déplacements, niveler les zones de passage, fournir des tenues et des gants protecteurs contre le froid et l’humidité, optimiser les gestes de travail, rappeler aux compagnons de bien s’hydrater, sont autant de mesures qui contribuent à réduire le risque vibratoire.
« Beaucoup de progrès ont été faits au niveau de l’outillage portatif et de la suspension des engins de chantier », souligne le Dr Jean-Marc Plat, médecin du travail à l’APST-BTP 06 à Vallauris (Alpes-Maritimes). Néanmoins, un certain nombre de compagnons, même bien équipés, restent exposés à des niveaux élevés de vibrations. C’est le cas des utilisateurs de marteaux-piqueurs, qui atteignent la valeur limite d’exposition (VLE) journalière maximale en quelques heures. « Même lorsque nous savons d’emblée que la VLE est dépassée, il est important de réaliser des mesures d’exposition sur les équipes. C’est très efficace pour faire prendre conscience aux salariés et au chef d’entreprise de la nécessité d’alterner les tâches ! », insiste le spécialiste. Pour les vibrations corps entier, le décret n° 2005-748 du 4 juillet 2005 établit la valeur d’exposition journalière déclenchant l’action (mesures techniques et organisationnelles) à 0,5 m/s2 et la valeur limite d’exposition journalière à 1,15 m/s2. Pour les vibrations mains-bras, ces valeurs sont fixées à 2,5 et 5 m/s2.
1 Contraction douloureuse des vaisseaux sanguins et blanchissement des extrémités.
Chocs répétés, quels impacts pour la santé ?
Si la problématique des vibrations produites par les machines vibrantes portatives ou guidées à la main est aujourd’hui bien connue, celle des chocs répétés l’est moins. L’INRS a organisé à Nancy, en juin 2023, dans le cadre de sa XVe conférence internationale sur les vibrations mains-bras, un atelier sur les « HTS » ou hand transmitted mechanical shocks (chocs mécaniques transmis à la main par des outils comme les clés à choc, pistolets à clou…). Les vibrations induites par ces machines sont de fréquence plus élevée que celles actuellement prises en compte dans les normes internationales de mesure, notent les organisateurs. L’objectif de cette rencontre visait à rassembler les connaissances sur ces chocs et établir un consensus sur la métrologie de ce type de vibrations.
4 habitudes simples pour réduire l’exposition aux vibrations
Bien régler le siège avant de s’installer
De nombreux engins de chantier disposent désormais de siège à suspension. Pour bien protéger son dos et diminuer la transmission des vibrations, il est important de prendre le temps de régler le siège à sa taille et à son poids. De même, bien régler la ceinture de sécurité aide au maintien d’une bonne posture.
Alterner les tâches pour limiter les expositions
Le recours à la technique la moins émettrice de vibrations, le choix d’outils à faible émission vibratoire et l’entretien du matériel sont essentiels pour diminuer le niveau d’exposition. Si cela ne suffit pas, la rotation des tâches permet de protéger les salariés les plus concernés.
Entretenir les voies de circulation
Niveler les zones de déplacement, aplanir les sols et aménager des voies de circulation propres diminuent considérablement les vibrations supportées par les conducteurs d’engins ou de camions. Réduire les distances en organisant les circuits en amont, modérer la vitesse des véhicules et veiller au gonflage des pneus y contribuent également.
Adapter le matériel pour absorber les vibrations
Les manchons pour poignées vibrantes absorbent une partie des chocs et vibrations. D’autres moyens, comme les gants, aident à les amortir, même si leur efficacité reste limitée. Quand cela est possible, le recours à des outils télécommandés est conseillé pour les tâches exposant à de fortes secousses.