Amiante : inscription d’une maladie professionnelle au compte spécial
Lorsque l'employeur demande que les dépenses afférentes à une maladie professionnelle contractée par l’un de ses salariés soient inscrites au compte spécial, il appartient à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat/Cramif/CGSS), qui a inscrit ces dépenses au compte AT/MP de l’établissement de cet employeur, de rapporter la preuve que la victime a été exposée au risque de la maladie dans l'un de ses établissements.
Date du texte : 1 déc. 2022
Arrêt de la Cour de cassation, 2e chambre civile, 1er décembre 2022, n°21-11.252
Un salarié, embauché en qualité d’agent technique d’entretien de 2005 à 2011, a déclaré en 2017 une maladie professionnelle consécutive à l'inhalation de poussières d'amiante. La Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) a pris en charge cette maladie au titre du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles.
Les dépenses liées à la prise en charge de cette maladie professionnelle ont été imputées par la Carsat au compte AT/MP de l’employeur, qui conteste cette décision.
Ce dernier saisit alors la cour d’appel en demandant le retrait de ces dépenses de son compte AT/MP et leur inscription au compte spécial. L’employeur considère en effet que le salarié n’a pas été exposé au risque d'inhalation de poussières d'amiante au sein de son établissement.
La cour d’appel rejette la demande de l’employeur au motif que ce dernier n’a produit aucune preuve démontrant que le salarié n’a pas été exposé aux travaux exposant au risque de la pathologie professionnelle contractée dans son établissement.
L’entreprise forme alors un pourvoi en cassation. La Cour de cassation censure l’arrêt rendu par la cour d’appel, considérant que cette dernière a inversé la charge de la preuve, et qu’il appartenait à la Carsat ayant imputé le sinistre sur le compte AT/MP de l’établissement de prouver que le salarié a bien été exposé chez ce dernier employeur.
La maladie professionnelle est présumée contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque. Il n’existe cependant pas de présomption d’exposition au risque auprès du dernier employeur qui obligerait ce dernier à démontrer que le salarié n’a pas été exposé au risque dans son établissement.
Ainsi, lorsque l’employeur demande l’inscription au compte spécial pour les dépenses afférentes à une maladie professionnelle contractée par un salarié, il appartient, dans un premier temps, à la Carsat (qui a inscrit ces dépenses au compte AT/MP de cet employeur) de rapporter la preuve que l’affection déclarée par la victime est imputable aux conditions de travail au sein des entreprises qui l'ont précédemment employée, sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie. Dans un second temps, dans le cas où la Carsat n’apporte pas cette preuve, il incombe à l’employeur de prouver que la maladie ne pouvait résulter que d'une exposition au risque pour le compte des précédents employeurs.
Pour les juges de la Cour de cassation, les juges de la cour d’appel ont donc renversé la charge de la preuve.
En cas de succession d’employeurs, la maladie professionnelle est présumée avoir été contractée auprès de l’employeur chez qui était le salarié au moment de la survenance de sa maladie.
Dans le cas des victimes ayant été exposées à l’amiante, les symptômes liés à ces expositions se déclarent généralement entre dix et quarante ans après l’exposition, alors que ces salariés ne travaillent parfois plus pour le compte du ou des précédents employeurs chez qui ces derniers ont pu contracter la maladie. Ainsi, l’article 2 de l’arrêté du 16 octobre 1995 pris pour l'application des articles D. 242-6-5 et D. 242-6-7 du Code de la sécurité sociale relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles permet au dernier employeur, qui se voit imputer les dépenses liées à la prise en charge de la maladie, de solliciter leur inscription au compte spécial, notamment lorsque :
- La maladie professionnelle a été constatée dans un établissement dont l'activité n'expose pas au risque mais ladite maladie a été contractée dans une autre entreprise qui a disparu ou dans un établissement relevant d'une autre entreprise qui a disparu ou qui ne relevait pas du régime général de la sécurité sociale ;
- Le salarié victime de la maladie professionnelle a été exposé au risque successivement dans plusieurs établissements d'entreprises différentes sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie.