Que recouvrent les risques chimiques ?
Médecin du travail en Santé BTP, le docteur Quadrini préconise une approche globale du risque chimique en entreprise intégrant les produits manufacturés.
Date de mise à jour : 17 janv. 2025 - Auteur : Loïc Féron

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Médecin-conseil auprès de l’OPPBTP, le docteur Isabelle Quadrini participe actuellement à l’élaboration d’un questionnaire de perception du risque chimique à destination des salariés. Ce questionnaire sera l'un des éléments de la campagne de sensibilisation prévue en 2025 sur l’accompagnement des entreprises dans l’inventaire des produits manufacturés.
Comment les produits chimiques sont-ils appréhendés par les entreprises ?
Le risque chimique est très souvent identifié lors des visites en entreprise qu’effectuent les services de santé au travail. Il est pourtant méconnu, peu pris en compte et sous-évalué. À l’évocation des produits chimiques, le raccourci est vite fait avec les produits CMR* et la prévention vise souvent la réduction des émissions des fibres d’amiante, de la silice et des poussières de bois. Pour autant, dans tous les métiers du BTP, des salariés manipulent des matériaux qui peuvent être aussi allergisants, irritants, voire toxiques, comme le ciment ou la chaux utilisés par les maçons. C’est pourquoi la campagne de l’OPPBTP portera volontairement sur l’inventaire des produits chimiques manufacturés.
Est-ce la conservation ou l’utilisation de ces produits qui pose question ?
Le stockage doit être fait dans des locaux bien ventilés, en veillant à ne pas mélanger certains produits et en limitant l’accès des utilisateurs. Le transvasement des produits est source de risque. Pour les conditionnements imposants, les produits sont parfois transvasés dans des récipients plus petits sur lesquels l’étiquetage n’est pas forcément reproduit. J’ai vu, dans une entreprise de peinture, le dirigeant conserver des tas d’échantillons dans des pots sans aucun étiquetage. Plus généralement, les entreprises connaissent rarement la nature des produits utilisés et leurs effets sur la santé. Éviter le transvasement ou, sinon, reproduire correctement l’étiquetage fait partie des conseils que nous donnons.
Dans ce contexte, comment structurer un plan d’action ?
La prévention primaire consiste à substituer un produit par un autre moins nocif répondant aux exigences de qualité, puis à gérer le risque résiduel en limitant le nombre de salariés exposés et en formant ces personnes à la compréhension des étiquettes et des pictogrammes. Quand elle est demandée au fournisseur, la fiche de données de sécurité permet à l’employeur d’évaluer la dangerosité des produits et de savoir quel type d’EPI mettre à disposition de ses salariés. Elle permet aussi aux médecins du travail d’identifier des CMR dans la composition du produit et d’imposer des restrictions à sa manipulation, par exemple par des femmes enceintes.
*CMR : cancérogène, mutagène, toxique pour la reproduction.
Dans tous les métiers du BTP, des salariés manipulent des matériaux qui peuvent être allergisants, irritants voire toxiques.
Ancien médecin généraliste au Havre, le Dr Isabelle Quadrini est médecin du travail depuis 2006 et exerce actuellement au sein du service santé BTP Normandie. Elle est également médecin-conseil auprès de l’agence régionale normande de l’OPPBTP.