Asthme professionnel, mieux le connaître pour mieux le prévenir
Dix à 15 % des asthmes ont une origine professionnelle. Plus ils sont détectés précocement, meilleur est leur pronostic. Une information adéquate sur les facteurs de risque contribue à le prévenir et une bonne connaissance des signes d’un asthme débutant permet d'anticiper son aggravation.
Date de mise à jour : 5 mars 2024 - Auteur : Cendrine Barruyer
● L’asthme est souvent d’origine allergique.
● Les irritants et sensibilisants inhalés peuvent provoquer un asthme professionnel.
● Au moindre signe d’alerte, un bilan respiratoire et allergologique doit être réalisé.
Article paru dans PréventionBTP n°281-Février 2024-p. 30.
Toux récurrente, essoufflement, sensations d’oppression thoracique, respiration sifflante… Ces manifestations sont les signes habituels de l’asthme. Caractérisée par une inflammation de la muqueuse des bronches, cette maladie est en général liée à des allergies respiratoires. Du moins chez les sujets jeunes et les enfants. « La survenue d’un asthme chez un adulte doit interroger sur une possible origine professionnelle, surtout si ce dernier exerce une profession à risque », indique le Dr Emmanuelle Penven, médecin du travail au CHRU de Nancy. Selon la Cnam, 10 à 15 % des asthmes se déclarant à l’âge adulte ont une origine professionnelle. Six professions totalisent la moitié des cas. Parmi elles, les peintres et les menuisiers.
Les asthmes professionnels sont en majorité allergiques
Si la majorité des asthmes professionnels (80 à 90 % selon les études internationales) est allergique, la situation est autre dans le BTP où les substances sensibilisantes inhalées ne sont pas si nombreuses, comparativement aux vapeurs, gaz, fumées, produits chimiques volatiles ou poussières irritantes. « Ces irritants peuvent aggraver un asthme préexistant, révéler un asthme latent, ou être la cause directe d’un asthme », souligne le Dr Penven.
Prévenir l'asthme professionnel
En prévention primaire, le repérage des agents sensibilisants et des irritants des voies respiratoires dans l’environnement de travail est l’étape clé. La substitution, quand elle est possible, ou la réduction des expositions, s’impose pour prévenir les allergies ou une hypersensibilité bronchique, qui risquerait d’évoluer vers un asthme. Les principaux sensibilisants respiratoires dans le BTP sont les résines époxy ou polyuréthane, les acrylates, les poussières de bois, et surtout les isocyanates (lire l'encadré).
En prévention secondaire, le médecin du travail joue un rôle essentiel en dépistant la maladie dès ses prémices. La gravité de l’asthme est liée au temps de latence entre le début des symptômes et la prise en charge. L’arrêt de l’exposition à l’allergène est la mesure thérapeutique déterminante à prendre en cas d’asthme professionnel allergique. Pour les asthmes provoqués par des expositions fortes aux irritants, « la maladie s’atténue en général au cours des deux ou trois années suivant la réduction des expositions », indique le Dr Penven.
Enfin, en prévention tertiaire, chez un salarié souffrant d’un asthme non professionnel aggravé par son travail, ces mesures d’éviction sont également importantes. Un aménagement du poste pourra être préconisé pour éviter les cofacteurs favorisants (travail au froid, efforts importants…). Le Dr Penven rapporte que, selon les études, 20 à 25 % des asthmatiques observent une aggravation de leur symptôme du fait d’expositions professionnelles. De plus, l’asthme est un pourvoyeur important d’insuffisance respiratoire. D'où l'importance de le dépister le plus tôt possible.
Diisocyanates, se former avant de les manipuler
Parmi toutes les substances sensibilisantes auxquelles sont exposés les travailleurs du BTP, les diisocyanates sont les plus préoccupants. Ils sont présents avec une concentration supérieure à 0,1 % en poids du mélange dans certaines résines, peintures, mastics, colles, systèmes d’étanchéité liquide et mousses polyuréthane… « Les réactions sont rapides et peuvent être très fortes pour une petite concentration », prévient le Dr Emmanuelle Penven. Depuis le 24 août 2023, une formation est obligatoire avant toute utilisation de produits dont la concentration en diisocyanates est supérieure à 0,1 % en poids. Cette formation sera renouvelée tous les cinq ans. Selon la classification UE harmonisée, les diisocyanates font partie des sensibilisants respiratoires de catégorie 1.
4 moyens de prévenir l’asthme ou son aggravation
Se protéger pendant les tâches fortement émissives
Peintres, menuisiers, soudeurs, mais aussi métiers dont l’activité dégage des poussières, fumées et gaz, sont exposés au risque d'asthme. Pour ces compagnons, le recours à des techniques de travail ou modes opératoires moins émissifs et le port d’EPI adaptés est requis.
Être attentif aux premiers signes d'hyperréactivité
Les premiers signes d’hyperréactivité bronchique passent souvent inaperçus. Les symptômes se manifestent souvent en fin de journée, une fois rentré à la maison. Une toux traînante doit alerter et conduire à consulter le médecin du travail. Si ces signes s’améliorent le week-end ou pendant les vacances, il faut poursuivre les investigations !
Mesurer le souffle au moindre doute
Si l’enquête révèle une aggravation des symptômes pendant le travail, le médecin du travail réalisera une spirométrie pour estimer le volume pulmonaire et les débits expiratoires. Si l'examen est normal, car l’asthme est intermittent, le médecin peut donc demander au salarié d'automesurer son souffle plusieurs fois par jour pendant plusieurs semaines.
Apprendre les bons gestes dès le plus jeune âge
Un jeune en CFA souffrant d'une rhinite allergique ou d’asthme aux acariens peut avoir accès aux métiers du BTP, mais il devra être particulièrement vigilant aux poussières et autres irritants dans son environnement professionnel (pas de soufflette, pas de balayage à sec, port d’EPI adaptés…).