Jeux olympiques : la construction du Village des Athlètes déploie une stratégie de prévention innovante

Les Jeux olympiques de Paris 2024 approchent à grands pas. Une soixantaine d’ouvrages pérennes sont en cours de construction pour offrir aux athlètes, au public et aux médias une quinzaine olympique mémorable. Parmi les chantiers les plus importants figurent le Village des Athlètes, situé sur les communes de Saint-Ouen, Saint-Denis, l’île-Saint-Denis, et le Cluster des médias, sur les communes de Dugny, La Courneuve et Le Bourget. Créée en 2017, la Solideo est l’établissement public industriel et commercial (Épic) qui réalise et supervise l’ensemble des chantiers et assure leur reconversion après les Jeux pour l’héritage au territoire et à ses usagers.

Soixante chantiers en milieu urbain francilien et aucun retard possible

Nathalie Poncin, référente HSE et adjointe du directeur du Cluster des médias présente les défis que doit relever la Solideo. « La plupart des chantiers sont déployés en milieu urbanisé avec une importante densité de flux. Sur le chantier du Village des Athlètes, il y aura au pic d’activité plus de 400 livraisons par jour, 3 500 collaborateurs, 40 grues avec des enjeux de circulation piétons et véhicules… Par ailleurs, la douzaine de maîtres d’ouvrage implique une coordination importante entre chaque acteur. » Ces maîtres d’ouvrage sont pour la plupart des grands acteurs du BTP en France déjà très acculturés à la prévention des risques sur le chantier. Alors, quel rôle peut jouer la Solideo ? « Notre ambition commune est de faire de la sécurité une priorité majeure de nos chantiers. Pour cela, nous devons influer sur l’approche de la prévention des risques professionnels, en mettant en place des actions communes et en cultivant cette notion de subsidiarité. En effet, chaque acteur arrive avec ses plans d’action et ses mesures de prévention. Nous leur avons proposé d’élaborer des engagements communs à travers une charte afin de promouvoir cette acculturation parmi tous les acteurs des chantiers. »

Pour parvenir à ce résultat, l’OPPBTP a accompagné les équipes de Solideo. Paul Duphil, secrétaire général de l'OPPBTP, détaille le rapprochement entre les deux entités et l’inspiration du cas des Jeux olympiques de Londres. « Solideo était déjà en contact avec d’autres institutionnels de la prévention : services de l’État, Drieets Ile-de-France et les services de l’Assurance maladie (Cramif). Nous avons rencontré la direction début 2021, en présentant la référence d’excellence des JO de 2012 sur les sujets santé-sécurité avec une organisation tout à fait remarquable, qui s’est traduite par des résultats exceptionnels avec zéro accident grave ou mortel malgré de très importants travaux. L’objectif était alors de proposer un accompagnement vers de la haute performance. »

La charte HSE en faveur de la santé, la sécurité et des conditions de travail

Au-delà des éléments d’organisation et des mesures spécifiques, la Solideo a souhaité parachever cette organisation d’ensemble et permettre une optimisation interchantiers pour la meilleure sécurité possible. Plusieurs actions ont déjà été engagées, à commencer par un accompagnement de l’ensemble des maîtres d’ouvrage. Objectif : les aider à identifier des points clés et accompagner les personnels d'exécution des différents lots à acquérir les points de compétences nécessaires pour gérer au quotidien les questions de santé-sécurité (formation des personnels, points d’organisation…). Ce travail a pris la forme d’une Charte spécifique santé-sécurité pour construire une culture commune de la sécurité.

« Les principes généraux portent d’abord sur le rappel des responsabilités principales des différents acteurs, maîtres d’ouvrage et entreprises générales en particulier. Elle identifie aussi l’équilibre à construire entre sécurité réglée et sécurité gérée, et promeut le principe de bienveillance et d’écoute entre toutes les parties prenantes. » Paul Duphil poursuit : « La Charte porte en creux la question du leadership : nous devons construire ensemble une victoire collective sur la santé-sécurité, en impliquant les différents acteurs depuis le DG de la Solideo jusqu’à l’ouvrier qui intervient directement sur le chantier. »

Cette Charte est partagée à tous les niveaux, précise Nathalie Poncin, de Solideo : « Les CSPS de nos chantiers, préventeurs des chantiers qui font l’objet de groupes de discussion avec la constitution de comités techniques à l’échelle des chantiers. Le dernier niveau est le collège HSE interchantiers, qui associe également les représentants de la charte sociale. »

Une première réunion du collège interchantiers avec l’ensemble des maîtres d’ouvrage et les partenaires sociaux

« La multiplicité d’acteurs et la co-activité avec des enjeux de planning importants rendent cette démarche indispensable. Nous avons souhaité faire de la sécurité et la prévention des risques un enjeu majeur pour créer une culture commune de la sécurité et une bienveillance collective entre tous les acteurs du chantier, au travers d’actions concrètes », poursuit Nathalie Poncin. « La Solideo anime les actions visant à augmenter le niveau de conscience collective sur les risques professionnels. Chaque mode opératoire se conforme déjà à un cadre réglementaire (expertise, contrôle, etc.), mais notre objectif est d’atteindre un niveau d’acculturation et une vigilance des risques partagée. Pour cela, nous portons une attention particulière sur les sous-traitants, les intérimaires, pour que chaque acteur bénéficie du même niveau d’information et de formation. La sécurité se doit d’être au cœur du management opérationnel de chaque maître d’ouvrage sur nos chantiers. »

Cette première réunion, qui s’est tenue le 15 mars dernier, constitue une étape importante pour formaliser officiellement cette démarche. À la fois un aboutissement et un point de départ pour Paul Duphil : « Un aboutissement car tenir cette réunion était le résultat d’un travail préparatoire sur les objectifs et les intérêts de ce collège. Il est très innovant de rassembler ainsi tous les maîtres d’ouvrage, entreprises, salariés, pouvoirs publics… dans une mission tournée vers l’échange autour des éléments de prévention souhaités pour le futur. Mais aussi un point de départ où l’OPPBTP a invité les différents acteurs à se saisir de cet outil au service de l’organisation collective. »

Cette charte est également déployée sur le Village des Médias et certains autres chantiers, pour faire de la préparation des Jeux olympiques un exemple aussi en termes de prévention des risques. Nathalie Poncin conclut : « Il s’agit de chantiers extraordinaires, donc leur mise en œuvre se doit aussi d’être extraordinaire et exemplaire. » Le prochain collège interchantiers est prévu à la fin de l’été 2022.