Plan général de coordination SPS : responsabilité du maître d’ouvrage délégué
Le maître d’ouvrage délégué qui ne remet pas le plan général de coordination SPS à son cocontractant engage sa responsabilité en cas d’accident, d’autant plus si le PGCSPS ne traite pas de l’ensemble des risques.
Date du texte : 12 sept. 2023
Que s’est-il passé ?
Arrêt de la Cour de cassation, chambre criminelle, 12 septembre 2023 – n°22-86.894
Trois salariés du sous-traitant de l'entreprise du lot électricité ont été blessés sur un chantier alors qu’ils travaillaient sur une armoire électrique qui n’avait pas été mise hors tension.
Le maître d’ouvrage délégué a été poursuivi pour délits et contraventions de blessures involontaires, commis dans le cadre du travail, par maladresse, imprudence, inattention, négligence à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.
La responsabilité du maître d’ouvrage délégué a été retenue pour avoir omis de respecter ses obligations relatives à l’évaluation des risques en matière d’installations électriques. Il a été condamné à une amende de 20 000 euros et une autre amende de 1 000 euros. Cette condamnation est confirmée en appel ; le maître d’ouvrage délégué forme alors un pourvoi en cassation.
Le maître d’ouvrage délégué considère qu’il avait conclu un contrat de coordination SPS, notamment en vue de procéder à l’évaluation des risques, de voir établi un plan général de coordination sécurité protection de la santé (PGCSPS), comprenant notamment le risque électrique, et avait expressément demandé que le coordonnateur SPS organise une visite d’inspection commune avec l’entreprise titulaire du lot électricité. À ce titre, le maître d’ouvrage délégué considère que c’est la seule responsabilité du coordonnateur SPS qui devrait être retenue.
Les juges de cassation confirment cependant sa responsabilité pénale pour l’accident du travail.
Pourquoi cette décision ?
Selon la Cour de cassation, le PGCSPS établi par le coordonnateur SPS ne mentionnait pas le risque électrique et, contrairement à l’obligation imposée par le Code du travail, n’avait pas été remis à la société titulaire du lot électricité avant le démarrage des travaux (article R4532-44 du Code du travail).
Elle confirme que le coordonnateur SPS aurait dû s’assurer que le PGCSPS mentionnait le risque électrique, car l’existence de ce risque était manifeste eu égard à la définition des travaux.
Elle indique par ailleurs que si le PGCSPS avait mentionné ce risque et avait été transmis à l’entreprise titulaire du lot électricité et à son sous-traitant, un protocole aurait permis de définir la mise hors tension de l’installation et de faire intervenir les salariés en sécurité.
Elle rappelle cependant que la désignation d’un coordonnateur SPS ne modifie ni la nature ni l’étendue de la responsabilité des acteurs de l’opération, et que le coordonnateur SPS exerce sa mission sous la responsabilité du maître d’ouvrage.
La Cour de cassation en déduit que le maître d’ouvrage a commis des manquements à des obligations de prudence ou de sécurité prévues par la loi ou le règlement en s’abstenant d’accomplir les diligences normales qui s’imposaient compte tenu de la nature de ses missions, de ses compétences, du pouvoir et des moyens à sa disposition. En effet, il ne pouvait ignorer la nature électrique des travaux à effectuer et les risques associés. Pour autant, il n'a pas veillé à ce que le PGCSPS, rédigé par son coordonnateur, mentionne ce risque et soit diffusé auprès de toutes les entreprises intervenantes.
Commentaire
La Cour de cassation a donc considéré que le maître d’ouvrage avait commis une faute en ne remettant pas le PGCSPS à l’entreprise titulaire du lot électricité, contrairement à ce qui est exigé par l’article R4532-44 du Code du travail.
Par ailleurs, la Cour de cassation a, dans cette décision, estimé que le maître d’ouvrage avait manqué à ses obligations de prudence et de sécurité en ne s'assurant pas que le risque électrique était correctement évalué dans le PGCSPS. Il appartenait au maître d’ouvrage de faire remédier à l’insuffisance manifeste du PGCSPS. En cette absence, la Cour a donc confirmé sa responsabilité pénale. En effet, elle considère que ces manquements ont contribué à la survenance du dommage engendrant la responsabilité du maître d’ouvrage.