Travailler en sécurité sur une toupie : règles d'utilisation et équipements complémentaires
D'un usage courant dans les ateliers de menuiserie et de charpente (même si on peut en trouver de manière plus occasionnelle sur les chantiers), les toupies nécessitent des mesures de prévention adaptées, en particulier pour se protéger des rejets de bois et les mains. Voici les préconisations pour utiliser cette machine à bois en sécurité. Egalement deux dispositifs de protection complémentaires à fabriquer soi-même : le serre-pièces « Duluc » et la servante à butée réglable (modèle INRS). L'utilisation d'une toupie nécessite des méthodes et le choix de matériels adaptés à la nature des travaux (travail au guide, arrêté, en avalant), au nombre et à la longueur des pièces.
Date de mise à jour : 14 sept. 2020
Utilisation de la toupie
Avant l’utilisation de la toupie, veuillez vous assurer de l’état du disque de coupe (état d’usure des plaquettes rapportées) ; vérifier que les disques de coupe ou autres outils ne présentent aucun défaut ou signe de cassure. Veillez à l’adéquation entre les outils de coupe et la tâche d’usinage à effectuer (usinage de tenon, opération de finition, etc.). Utiliser un disque de coupe non adapté au matériau ou à l’opération d’usinage vous expose à de nombreux risques (blocage de l’outil, projection/rejet, surchauffe de la pièce usinée, bruit, vibrations, etc.).
Lors de l'usinage sur toupie, l’arbre tourne dans le sens contraire à l’avancée de la pièce de bois. Il y a une sensation de résistance et il y a un risque d’éjection brutale de la pièce de bois. Il est donc important de ne pas vous positionner dans la ligne potentielle de rejet, ainsi que de prévoir un balisage autour de cette machine pour éviter toute présence lorsqu’elle est utilisée. En outre, vos mains sont particulièrement exposées (coupures, sectionnement, amputation, voire entraînement si vous portez des vêtements amples ou des gants mal adaptés) :
- si vos deux mains ne sont pas placées à droite de l’outil lors de l'usinage : ne jamais maintenir la pièce avec sa main gauche, à gauche de l’outil ;
- lors du pointage de l'outil et des travaux arrêtés : en cas de pointage en milieu de pièce sans protection, de fausse manœuvre, d'absence de dispositif antirejet, de vitesse de coupe inadaptée, d'affûtage médiocre, etc. ;
- lors du travail en avalant, volontairement ou involontairement, de l'usinage en bout de pièce, ou du toupillage sur petites pièces ;
- lors du pointage de l’outil par approximations successives alors que la machine est en fonctionnement, ou pour tenter un « débourrage » manuel du carter de protection prévu pour l’aspiration des copeaux ;
- en l'absence de protections : protecteur pour toupie, montage d'usinage adapté pour le toupillage sur petites pièces (serre-pièces), prolongateur de table ou servante pour améliorer la stabilité des pièces de grande longueur.
Équipez la toupie d'un protecteur
Vendu en seconde monte, un protecteur avec presseur latéral et presseur vertical protège les mains de l'opérateur, le presseur latéral pouvant faire office de garde-main. La buse d’aspiration des copeaux évite l'inhalation des poussières de bois (risque CMR). Les modèles sont conçus pour travailler soit au guide, soit à l'arbre.
Il existe des protecteurs pour toupies. Rapprochez-vous des constructeurs pour qu’ils puissent vous conseiller sur les protecteurs les plus adaptés à votre activité (certains protecteurs sont inefficaces, voir contre-productifs, si vous usinez des pièces particulièrement imposantes) .
Sécurisez l'implantation de la toupie
Éloignez les tiers de la zone possible de rejet. Personne ne doit passer ou séjourner dans cette zone.
Veillez à la vitesse de coupe
Vérifier que la vitesse de rotation de la broche est en adéquation avec la vitesse de coupe de l’outil avant la mise en route de la machine (risque d’éclatement en cas de survitesse ou de mauvaise qualité d’usinage en cas de sous-vitesse).
Le choix de la vitesse de rotation de la broche (tr/min) est fonction de la vitesse de coupe (m/s) et du diamètre de l’outil (mm).
Se référer au marquage de la fréquence de rotation gravé sur le corps de l’outil ; à défaut, se conformer au tableau de valeurs.
Méthodes de pointage de l’outil de coupe (réglage de la position verticale et horizontale)
- Pointez l’outil lorsque la machine est à l’arrêt : c'est la méthode la plus sûre.
- Utilisez un pied de profondeur muni d’un comparateur spécialement conçu pour cet usage, à l’extrémité de l’outil coupant, soit un appareil de mesure (type Hebor).
- Vous pouvez aussi pointer en bout de l’outil coupant.
- Si vous vérifiez le pointage en milieu de pièce, utiliser une servante à butée (escamotable et orientable) et disposer un écran vertical servant habituellement de presseur latéral ; il fera office de garde-main.
Petites pièces : utilisez un serre-pièces pour manœuvrer la pièce à usiner
L'absence de protecteur peut être liée à la nature du travail ou à une pièce de faibles dimensions. Dans ce cas, le menuisier doit réaliser un montage d'usinage adapté.
Le serre-pièces permet de maintenir la pièce de bois. © Pierre-Louis Bouvier.
Le serre-pièces permet de maintenir fermement la pièce, tout en formant un écran entre les mains et l’outil. Utilisé comme poussoir, il présente une surface d’appui importante sur la table et assure une excellente prise de mains.
Le serre-pièces « Duluc » est constitué d'une table et de deux poignées : la première actionne un panneau qui serre la pièce progressivement contre la table, tandis que la seconde la maintient fermement. Sa fabrication est aisée. Le matériau est en bois dur ou mi-dur : latté ou contreplaqué (19 ou 22 mm d’épaisseur). L’assemblage est collé et vissé.
Pièces longues : utilisez une servante à butée escamotable et orientable
Les dispositifs de guidage peuvent être complétés par des prolongateurs de table ou des servantes. Ils améliorent la stabilité des pièces ouvrées dont la longueur est supérieure à celle de la table de la toupie.
Servante pour toupie. ©Pierre-Louis Bouvier
Téléchargez le schéma de fabrication de cette servante à butée intégrée : « Sécurité des machines à bois - Cahier des protecteurs et des équipements pour les machines du menuisier », Note scientifique et technique NS 303, p.66, INRS, 2013. Issue d’une étude de l'INRS, cette servante à faire soi-même est équipée d’une butée réglable à demeure pour pallier tout risque de rejet en cas de travail arrêté. Grâce à un dispositif de basculement latéral, la butée peut être escamotée rapidement. Cette servante peut être complétée symétriquement avec une autre unité côté sortie de la machine.
Travaux passants au guide
Pour empêcher tout contact des mains avec l’outil en cours d’usinage, ou une fausse manœuvre avant ou après usinage :
- maintenir toujours les mains à distance de l’outil, notamment en fin de passe ;
- ne jamais placer la main gauche au-delà de l’outil si une butée n’est pas mise en place ;
- utiliser un protecteur avec presseur latéral et presseur vertical. Dans le cas de fraisage de pièces de grande largeur mais de faible épaisseur, un seul de ces presseurs peut être utilisé en fonction du travail à, réaliser ;
- travailler toujours, si possible, avec l’outil en dessous de la pièce ;
- fixer solidement les guides (par des poignées intégrées plutôt que par des clés) et les aligner dans un même plan vertical. La continuité est assurée par des barrettes (en bois, en alliage d’aluminium) ou par un faux guide rapporté en contreplaqué, afin d'éviter que la pièce ne s’engouffre dans la lumière (plongée de l’extrémité de la pièce dans l’outil) ;
- disposer un carter solidaire du support de guide pour protéger la partie non travaillante de l’outil qui sera relié à un dispositif d’aspiration ;
- utiliser des poussoirs pour l’usinage en fin de passe et des servantes pour les pièces longues.
Travaux arrêtés
Le pointage de l’outil en milieu de pièce peut provoquer un rejet brutal du bois à la moindre amorce de recul de la pièce (prise de bois importante à l’attaque et augmentation très rapide du pas d’usinage).
- Disposer une butée d’attaque et mettre en place un garde-main (presseur latéral).
- Utiliser des outils de forme ronde (à limitation continue du pas d’usinage) et des porte-outils universels avec contre-fers (appelés aussi refouleurs) pour les profils moulurés.
- Utiliser un dispositif de serrage avec un écran garde-main et poignées de maintien pour les petites pièces (serre-pièces Duluc) ou confectionner un montage d’usinage.
Travaux en avalant (bois sujets à éclats, contrefilés...)
Le travail en avalant peut servir à obtenir un meilleur état de surface. Afin d'éviter les rejets :
- toujours utiliser l’entraîneur ;
- ne jamais avaler avec une avance manuelle.
Travaux à l’arbre (pièces courbes)
Pour prévenir la proximité des mains avec l’outil, notamment à l’attaque et en fin de passe :
- travailler toujours avec l’outil en dessous de la pièce ;
- mettre en place une butée d’attaque indépendante, si nécessaire ;
- utiliser une lunette (à fixer sur la table) avec un patin presseur vertical faisant aussi office de garde-mains ;
- pour les petites pièces, utiliser un serre-pièces type Duluc ;
- pour les séries, utiliser un montage d’usinage manœuvré à la main ou mécaniquement.
Les travaux à l’arbre sont extrêmement dangereux : aucun système ne vous protège, ni les personnes se trouvant autour de la machine. Outre les projections de copeaux de bois, vous générez de nombreuses poussières qui sont particulièrement dangereuses. Ces travaux doivent alors se faire en portant un masque type FFP3 pour vous protéger des poussières les plus fines. Nettoyez votre poste de travail, après utilisation, avec un aspirateur industriel pour atelier bois ; il est rappelé que l’utilisation de la soufflette est proscrite. Organisez vos tâches de travail à l’arbre en prenant en compte ces aspects et si la dimension de vos pièces nécessite un travail à l’arbre plus qu’occasionnel, il serait peut-être intéressant de songer à changer de toupie pour avoir une machine plus appropriée à vos travaux.
Séries de pièces : utilisez un entraîneur automatique
Pour les travaux passants au guide, les entraîneurs automatiques sont adaptés aux séries de pièces à usiner. Ils se substituent aux mains de l’opérateur (suppression du contact avec l’outil).
Installez à demeure sur la machine un dispositif de protection avec presseurs latéral et vertical et escamotables (afin de travailler alternativement soit avec l’entraîneur, soit avec le protecteur presseur). En effet, l’entraîneur n’est pas toujours réglé pour un travail exécuté à l’unité ; et pour les travaux arrêtés, l’entraîneur ne peut pas être utilisé.
Distinguez les outils en fonction du type d’avance
Avance manuelle : utiliser des outils de forme ronde portant la mention « MAN » (pour avance manuelle du bois). Cette avance manuelle contre l’outil comprend l’avance manuelle par contact direct avec la pièce ouvrée, l’usage d’un chariot de tenonnage et celui d’un entraîneur.
Pour les moulures et profils particuliers, utiliser un porte-outil universel pourvu de refouleurs. Leur profil est identique à celui de l’arête tranchante des lames.
Avance mécanique (sur des corroyeuses, tenonneuses doubles...) : utiliser des outils portant la mention « MEC » (pour avance mécanique du bois).
Certificat de conformité
Marquage CE obligatoire sur toute machine neuve.
- Remise d’une attestation de conformité CE et de la notice d’instructions en français.
La toupie est également une machine bruyante. N’hésitez pas à consulter notre fiche Les risques liés au bruit sur les chantiers.
Téléchargez les fiches prévention :
À consulter sur le même thème : Travailler en toute sécurité avec une toupie tenonneuse