Travaux à proximité des réseaux : quelles obligations des maîtres d’ouvrage ?
Chaque année, en France, plus de 16 000 réseaux souterrains ou aériens sont endommagés à l’occasion de travaux à proximité de ceux-ci. Le maître d’ouvrage est le premier concerné pour assurer la sécurité lors de travaux à proximité des réseaux, comme le prévoit la réglementation en vigueur. L’occasion également pour le maître d'ouvrage, le maître d’œuvre et les entreprises de prévenir les blessures graves subies par les travailleurs ou les riverains, les atteintes à l’environnement, les dégâts matériels ainsi que les interruptions de service préjudiciables.
Date de mise à jour: 9 janv. 2024
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Le responsable de projet (maître d’ouvrage ou son représentant) a l’obligation de prendre en compte la présence des réseaux aériens, souterrains et subaquatiques de transport ou de distribution dès la conception de ses projets de travaux. Pour cela, il est tenu de mettre en œuvre, dès le début du projet des mesures techniques et organisationnelles précises afin que le chantier se déroule en toute sécurité.
L’application des principes généraux de prévention (PGP) peut amener le maître d’ouvrage à modifier son projet en phase conception en fonction des réseaux existants (modification d’implantation, de dimensions…).
En cas de non-respect de certaines de ses obligations, le maître d’ouvrage encourt une amende administrative pouvant atteindre 1 500 €, doublée en cas de récidive.
Travaux à proximité des réseaux : quels ouvrages sont concernés par la règlementation ?
Sont concernés :
- Les ouvrages sensibles pour la sécurité comme les canalisations de transport et canalisations minières contenant des hydrocarbures liquides ou liquéfiés, les canalisations de transport et canalisations minières contenant des produits chimiques liquides ou gazeux, les lignes électriques et réseaux d’éclairage public, les ouvrages conçus ou aménagés en vue de prévenir les inondations ou les submersions…
- Les autres catégories d’ouvrages : installations de communications électroniques, canalisations de prélèvement et de distribution d’eau destinée à la consommation humaine, à l’alimentation en eau industrielle ou à la protection contre l’incendie, en pression ou à écoulement libre, y compris les réservoirs d’eau enterrés qui leur sont associés et les canalisations d’assainissement, contenant des eaux usées domestiques ou industrielles ou des eaux pluviales.
Comprendre les classes de réseaux
Les plans des exploitants font mention d’une classification de leurs tronçons de réseaux selon la précision de leur localisation :
- Classe A : l’incertitude maximale de localisation du réseau est inférieure ou égale à 40 cm s’il est rigide et inférieure ou égale à 50 cm s’il est flexible.
- Classe B : l’incertitude maximale de localisation du réseau est supérieure à celle relative à la classe A et inférieure ou égale à 1,5 m. L'incertitude maximale est abaissée à 1 m pour les branchements d'ouvrages souterrains sensibles pour la sécurité et depuis le 1er janvier 2021, pour les branchements d'ouvrages souterrains non sensibles.
- Classe C : l’incertitude maximale de localisation du réseau est supérieure à 1,5 m ou 1 m pour les branchements d'ouvrages souterrains sensibles pour la sécurité et depuis le 1er janvier 2021, pour les branchements d’ouvrages souterrains non sensibles, ou dont l’exploitant n’est pas en mesure de fournir la localisation correspondante.
Les travaux à proximité des réseaux exemptés de la réglementation
Certains travaux sont exemptés de l’application de ces dispositions réglementaires :
- Travaux sans impact sur les réseaux souterrains comme les travaux ne comportant ni fouille, ni enfoncement, ni forage du sol et ne faisant subir au sol ni compactage, ni surcharge, ni vibrations susceptibles d’affecter les réseaux souterrains ou les poses dans le sol à plus de 1 m de tout affleurant de clous, chevilles, vis de fixation de longueur inférieure à 10 cm et de diamètre inférieur à 2 cm.
- Travaux suffisamment éloignés des réseaux aériens : il s’agit des travaux non soumis à permis de construire et ne s’approchant pas, soit à moins de 3 m en projection horizontale du fuseau des lignes électriques à basse tension (tension inférieure à 1 000 volts en courant alternatif, ou 1 500 volts en courant continu) ou du fuseau des lignes de traction associées à l’installation de transport, soit à moins de 5 m en projection horizontale du fuseau des autres réseaux et des travaux soumis à permis de construire et dont l’emprise est située intégralement à l’extérieur de la zone d’implantation du réseau.
- Travaux agricoles et horticoles de préparation superficielle du sol à une profondeur n’excédant pas 40 cm et les travaux agricoles saisonniers de caractère itinérant tels qu’arrosage et récolte.
- Réseaux électriques aériens à conducteurs isolés à basse tension.
- Ouvrages sous-marins situés au-delà du rivage de la mer.
- Consulter le téléservice du guichet unique.
- Envoyer le formulaire de déclaration de projet de travaux (DT) aux exploitants de réseaux indiqués par le guichet unique.
- Prendre en compte les réponses des exploitants de réseaux et réaliser d’éventuelles investigations de terrain complémentaires.
- Intégrer les démarches effectuées et les renseignements obtenus dans le dossier de consultation des entreprises (DCE).
- Appliquer les prescriptions contenues dans le Guide d’application de la réglementation relative aux travaux à proximité des réseaux (Fascicule 1, Dispositions générales).
Qu’est-ce que le téléservice du guichet unique ?
Le téléservice du guichet unique est géré par l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques). Il regroupe les coordonnées des exploitants de tous les réseaux situés en France et les cartographies sommaires de ces réseaux. Ce service est gratuit et ouvert 7 j/7 et 24 h/24.
La consultation du guichet unique : une démarche obligatoire
Depuis le 1er juillet 2012, que l’exécutant des travaux soit titulaire ou sous-traitant, que les travaux soient situés sur le domaine public ou sur un terrain privé, la consultation du guichet unique sur le site www.reseaux-et-canalisations.ineris.fr est une étape préalable obligatoire.
Elle peut se faire, soit directement par l’exécutant, soit par l’intermédiaire d’un prestataire conventionné avec l’Ineris et rémunéré par l’exécutant.
Le guichet unique propose en téléchargement les coordonnées des exploitants des réseaux concernés par le projet de travaux ; un plan avec les coordonnées géoréférencées de l’emprise du projet de travaux telle que dessiné sur le site du téléservice; le formulaire (Cerfa n° 14434*03) de Déclaration d’intention de commencement de travaux (DICT) en partie prérempli avec les renseignements fournis par l’exécutant et par le téléservice.
Quand envoyer la Déclaration de projet de travaux (DT) ?
Le formulaire DT doit être adressé le plus en amont possible du projet, accompagné du plan d’emprise de la zone de travaux, à chacun des exploitants de réseaux concernés. L’envoi peut se faire par voie dématérialisée (messagerie ou plate-forme internet des exploitants quand elles existent). Il peut également se faire par courrier.
DT/DICT : quand une déclaration commune peut-elle être réalisée ?
Si le maître d’ouvrage est également l’exécutant des travaux, et dans le cas d’opérations unitaires dont l’emprise géographique est très limitée et la durée de réalisation très courte, une déclaration commune DT/DICT peut être réalisée, sous réserve de respecter les règles relatives aux investigations complémentaires.
Que contiennent les réponses des exploitants de réseaux ?
Les réponses des exploitants sont faites au moyen du formulaire de récépissé de DICT (formulaire Cerfa n°14435*04). Avec ce document, les exploitants fournissent les plans de leurs réseaux et, le cas échéant, des recommandations techniques spécifiques pour faire exécuter les travaux en toute sécurité.
Les délais de réponse des exploitants de réseaux
Les exploitants de réseaux disposent d’un délai de réponse de 9 jours (jours fériés non compris) après la date de réception de la DICT. Dans le cas d’une déclaration commune DT/ DICT non dématérialisée, ce délai est porté à 15 jours. Ce délai peut être prolongé de 15 jours si l'exploitant doit réaliser des mesures de localisation.
À leur initiative, les exploitants peuvent proposer un rendez-vous sur le lieu du projet pour localiser précisément et sous leur responsabilité leurs réseaux. Dans ce cas, l’exploitant dispose alors d’un délai complémentaire de quinze jours (jours fériés non compris) pour la fourniture au déclarant des éléments relatifs à la localisation de l’ouvrage.
Si, dans les 3 mois à compter de la consultation du guichet unique, le marché ou la commande avec l’entreprise exécutant les travaux n’a pas été signé, le maître d’ouvrage doit renouveler sa DT. Il en est dispensé si le marché de travaux prévoit des mesures techniques et financières permettant de prendre en compte d’éventuels ouvrages supplémentaires ou modifications d’ouvrages.
Investigations complémentaires IC et opération de localisations OL : la marche à suivre
Les IC et les OL ont pour objet principal de permettre l’exécution des travaux avec le meilleur niveau de connaissance de l’encombrement du sous-sol et d’en renforcer la sécurité. Elles ont également pour objet de valider la faisabilité technique du projet.
Les IC permettent de préciser la localisation des ouvrages enterrés existants dans la zone d’emprise du projet de travaux ou à moins de 2 m de cette zone lorsque les données cartographiques fournies par les exploitants, en réponse à la DT, ne sont pas conformes (classes de précision B ou C en planimétrie), afin d’obtenir, autant que possible, la classe de précision A.
Dans le cas de réseau sensible, l’exploitant du réseau peut demander au maitre d’ouvrage de réaliser les IC. C’est dans ce cas l’exploitant qui prend en assume la charge.
Il est recommandé de compléter les IC par des opérations de localisation OL portant sur l’ensemble des réseaux, sensibles ou non sensibles présents dans la zone d’emprise des travaux prévus et rangés dans les classes de précision B ou C, y compris les branchements.
Dans la phase des travaux, des IC peuvent être nécessaires dans le cas de découverte d’un ouvrage sensible pour la sécurité. Dans ce cas, leur coût ne peut être imputé aux exploitants.
Quand n’est-il pas nécessaire de réaliser des investigations complémentaires ?
Les investigations complémentaires ne sont pas requises dans les cas suivants :
- Les travaux concernant la pose d’un branchement ou d’un poteau, la plantation ou l'arrachage d'un arbre, le forage d’un puits, la réalisation d’un sondage pour études de sol, la réalisation de fouilles dans le cadre des IC, la réalisation de travaux supplémentaires imprévus et de portée limitée.
- La zone d’emprise des travaux affectant le sol (terrassement, enfoncement, forage, décapage, compactage..) ne dépasse pas 100 m².
- Les travaux prévus sont des travaux de surface ne dépassant pas 10 cm de profondeur.
- Lorsque les informations transmises par l’exploitant dans le cadre du récépissé de Déclaration de Travaux lui permettent de garantir qu’aucun travaux de fouille, enfoncement ou forage du sol, ou travaux faisant subir au sol un compactage, une surcharge ou des vibrations ne seront effectués dans le fuseau de l’ouvrage ou du tronçon d’ouvrage.
- Les travaux prévus sont des travaux de maintenance d'ouvrages souterrains existants.
Néanmoins, le responsable de projet peut toujours prévoir des IC ou des OL s’il le juge nécessaire pour vérifier la faisabilité de son projet ou pour garantir une meilleure sécurité des travaux, notamment dans le cas de travaux sans tranchée.
Marquage ou piquetage initial des ouvrages souterrains : la marche à suivre
Pour chaque ouvrage souterrain en service, le maître d’ouvrage fait procéder sous sa responsabilité et à ses frais à un marquage ou piquetage au sol du tracé de chacun des ouvrages situés à moins de 2 m en projection horizontale de l’emprise des travaux et susceptible, compte tenu de sa profondeur, d’être endommagé par les travaux.
Les opérations de marquage ou piquetage sont précisées de façon explicite dans le marché ou la commande de travaux et sont réalisées conformément au fascicule 3 du Guide d'application de la réglementation relative aux travaux à proximité des réseaux.
Si l’exploitant d’un ouvrage souterrain n’a pas fourni les plans de ses ouvrages lors de la réponse à la DT, le marquage ou piquetage initial est réalisé par ses soins et à ses frais. Le marquage ou piquetage initial est maintenu en bon état tout au long du chantier par chacune des entreprises exécutant les travaux.
DT, réponses des exploitants, investigations complémentaires… Les pièces que le maître d’ouvrage doit joindre au dossier
Le maître d’ouvrage doit annexer obligatoirement au dossier de consultation des entreprises, ou à défaut au marché de travaux, l’ensemble des déclarations de projet de travaux (DT) qu’il a effectuées et les réponses (récépissé de DT avec les pièces jointes) reçues des exploitants de réseaux, ainsi que, le cas échéant, les résultats des investigations complémentaires.
La formation des intervenants à la prévention des risques d’endommagement des réseaux : qui est concerné ?
Depuis le 1er janvier 2018, certains intervenants doivent être titulaires d’une attestation de compétence consécutive à une formation (à renouveler tous les 5 ans) :
- les personnes préparant la consultation des entreprises et les marchés de travaux sous la direction du maître d’ouvrage (concepteurs) ;
- les personnes encadrant les chantiers (conducteurs de travaux, chefs de chantier, chefs d’équipe) ;
- tout salarié intervenant directement dans les travaux à proximité des réseaux aériens ou enterrés, soit en tant qu’opérateur d’engin, soit dans le cadre de travaux urgents. Sur tout chantier de travaux urgents, l’ensemble des personnels intervenant en terrassement ou en approche des réseaux aériens doit être titulaire d’une AIPR.
Effectuer le relevé topographique des ouvrages réalisés
Dans le cas de travaux de construction, d’extension ou de modification de réseau, si le maître d’ouvrage est différent du premier exploitant de l’ouvrage construit, il fait réaliser par un prestataire certifié le relevé topographique géoréférencé des réseaux réalisés.
La précision de ces relevés doit être telle que pour tous travaux ultérieurs à proximité du même ouvrage, aucune investigation complémentaire ne soit nécessaire pour le localiser. Les relevés topographiques sont transmis à l’exploitant.
Que faire en cas de découverte fortuite de réseaux souterrains en service ?
Si des ouvrages en service non recensés initialement ou positionnés de façon notablement différente par rapport aux plans sont découverts après la commande ou après la signature du marché de travaux, l’exécutant peut arrêter son chantier sans que cela n’engendre de préjudice pour lui.
Dans ce cas, le maître d’ouvrage sursoit aux travaux par ordre de service d’arrêt de travaux et réalise avec l’entreprise un constat contradictoire. Le maître d’ouvrage définit les mesures à prendre et peut faire procéder à la réalisation d’investigations complémentaires pouvant être à la charge de l’exploitant des ouvrages identifiés. Il définit ensuite par écrit les conditions de reprise du chantier.
Les actions complémentaires non prévues dans le marché de travaux initial feront l’objet d’un avenant à la charge du maître d’ouvrage.
La marche à suivre en cas de travaux urgents
Les travaux urgents sont les travaux non prévus et justifiés par la sécurité, la continuité du service public, la sauvegarde des personnes ou des biens ou la force majeure.
Le maître d’ouvrage qui ordonne les travaux urgents est dispensé de DT et l’entreprise de travaux est dispensée de DICT à condition que les personnes effectuant les travaux urgents disposent toutes de leur autorisation d’intervention en cours de validité.
Néanmoins, le maître d’ouvrage doit obligatoirement consulter le guichet unique pour savoir s’il y a des réseaux sensibles à proximité de la zone de travaux. Si tel est le cas, il ne peut faire engager les travaux qu’après avoir contacté les exploitants de ces réseaux en les invitant à venir sur place ou à lui répondre dans des délais compatibles avec la situation d’urgence, pour obtenir de leur part les consignes de sécurité. Il doit ensuite communiquer ces consignes à l’entreprise exécutant les travaux. L’entreprise ne devra pas subir de préjudice en cas d’immobilisation du chantier résultant d’un manque d’informations du maître d’ouvrage relative aux réseaux. Dans tous les cas, que les réseaux soient sensibles ou non, le commanditaire des travaux doit envoyer dans les meilleurs délais un avis de travaux urgents (Cerfa n° 14523*03) à leurs exploitants ; cet avis peut être postérieur aux travaux.
Que faire en cas d’endommagement de réseaux ?
Si un réseau a été endommagé même de façon superficielle, l’entreprise avertit l’exploitant dans les plus brefs délais. Un constat contradictoire (Cerfa n° 14766*02) disponible sur le guichet unique est établi entre l’exploitant du réseau et l’entreprise.