Utiliser des étaiements sur les chantiers de génie civil
L'étaiement doit être dimensionné en fonction des charges qu'il doit supporter, outre les dispositions de sécurité lors de sa conception. Pour les différentes phases d'utilisation, comme pour la phase de décintrage et d'enlèvement de l'étaiement, voici une analyse des risques ainsi que des mesures de prévention adaptées.
Date de mise à jour : 18 sept. 2024
Le calcul de l’étaiement
Le principe du calcul d’étaiement consiste à faire l’inventaire des charges de service à supporter par chaque poteau de l’étaiement et à s’assurer que l’on ne dépasse pas la capacité indiqué par le constructeur dans sa notice. Il faut également s’assurer que le support de l'étaiement est apte à reprendre la charge apportée par les poteaux sur les platines d’appui.
Généralement, un calage en bois disposé sous la platine permet de répartir la charge sur le sol pour ne pas dépasser sa capacité portante d’un sol de très bonne qualité. Une couche de grave ciment ou des fondations en béton peuvent être nécessaires suivant le calcul effectué pour la répartition de la charge au sol.
La capacité en service est donnée par le constructeur. Afin de tenir compte des conditions d’utilisation, on constate que la charge de ruine doit être divisée au moins par deux. Les conditions de calcul et de vérification de la capacité portante d’une tour d’étaiement sont données dans la norme NF P93-551 de mai 2016.
Ces calculs doivent être complétés par une étude de stabilité des tours lors du montage sous l’effet du vent. Dès lors que la hauteur dépasse 3,5 fois la largeur de l’embase, il faut liaisonner les tours entre elles ou bien les amarrer à la construction. Attention, le rapport peut être moindre pour les tours légères, comme les tours en aluminium.
Décintrage, démontage et déplacement de l’étaiement
L’enlèvement de l’étaiement est une phase délicate. L'article R4534-106 du Code du travail prévoit que l’on fasse appel à une personne compétente désignée par l’employeur pour en assurer le contrôle.
Après coulage, les éléments d’étaiement (étais de génie civil, tours, palées) sont en charge. L’effort de compression repris par l’étaiement empêche l’enlèvement de l’équipement. Il faut bien entendu s’assurer que l’ouvrage tient par lui-même, pour ensuite supprimer la compression à l’aide d’un système décintreur qui peut être assuré par :
- une boîte à sable,
- un décintreur mécanique à vis,
- un cric,
- un vérin.
Les systèmes décintreurs par vérin permettent de réaliser un préchargement contrôlé de l’étaiement. Parfois, l’étaiement est réutilisé afin de réaliser différentes travées d’un ouvrage, avec des hauteurs et de configurations de tours identiques. Il est alors intéressant de réutiliser les tours sans les démonter.
La note technique NT 24 de la Cramif et la norme NF P93-551 décrivent des systèmes de verrouillage des éléments entre eux qui permettent l’assemblage au sol, le déplacement ou le grutage des tours d’étaiement. Certains constructeurs prévoient des roues amovibles qui peuvent être ajoutées sur les tours afin de les déplacer. Il faut alors disposer d’un sol aménagé pour effectuer le ripage.
L’étaiement dans le fascicule 65
L’étaiement est classé, selon le fascicule 65 (cahier des clauses techniques générales applicables aux marchés publics de travaux, exécution des ouvrages de génie civil en béton armé ou précontraint), dans les ouvrages provisoires. Ceux-ci sont répartis en deux catégories suivant leur complexité et le niveau de risque vis-à‑vis des tiers ou de l’ouvrage définitif.
Les ouvrages simples et à faible niveau de risque sont classés dans la catégorie 2. En l’absence d’un classement des ouvrages dans le marché, cette classification est effectuée par l’entrepreneur, avec approbation du maître d’œuvre. L’entrepreneur soumet à l’acceptation du maître d’œuvre la désignation d’un chargé des ouvrages provisoires (COP).
Les contrôles effectués par le COP sont considérés comme des contrôles internes. Divers COP peuvent être désignés pour divers ouvrages provisoires. Le COP s’assure que les réponses apportées à l’évaluation des risques relatifs aux ouvrages provisoires sont pertinentes. Il assure le lien entre les études et la réalisation.
Pour les ouvrages provisoires de première catégorie, le plan qualité définit les procédures et les consignes concernant la réalisation et l’utilisation des différents ouvrages provisoires et il précise les modalités de contrôle interne, réalisé par le COP.
Pour ce qui concerne la sécurité au travail, le plan qualité est complété par le plan général de coordination (PGCSPS) établi par le coordonnateur de sécurité sous contrôle du maître d’ouvrage et le plan particulier de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) établi par l’entrepreneur.
Ouvrages provisoires : un projet à la charge de l'entrepreneur
Le projet des ouvrages provisoires est à la charge de l’entrepreneur. Il comprend tous les documents nécessaires à leur définition, sous forme de dessins d’exécution, de notices et de consignes, assortis des justifications correspondantes.
Pour les étaiements de première catégorie, avant tout début des opérations correspondantes, les documents constituant le projet et ceux attestant le contrôle interne du projet et de la réalisation sont soumis au visa du maître d’œuvre.
Pour les étaiements de deuxième catégorie, ces documents sont tenus à la disposition du maître d’œuvre, avant tout début des opérations correspondantes. Lorsque les étaiements sont destinés à supporter une partie d’ouvrage, un schéma définissant leur principe de constitution est adressé au maître d’œuvre quinze jours, au moins, avant tout commencement d’exécution.
L’étaiement dans la norme NF EN 13670 « Exécution des structures en béton »
Les exigences de la norme en matière de coffrages et étaiements sont précisées à l’article 5 et à l’annexe C. Les étaiements et les coffrages doivent résister aux charges qui leur sont appliquées (voir exemple paragraphe 1) et être suffisamment rigides pour assurer que les tolérances spécifiées pour la structure soient respectées (calcul des flèches).
La norme prévoit trois classes d’exécution : la classe 1 (la moins exigeante), la classe 2 (intermédiaire), la classe 3 (la plus exigeante). À chaque classe correspond un type de contrôle et une documentation de contrôle.
Si les spécifications d’exécution l’exigent, une note doit fixer les paramètres/classes de conception adoptés et décrire la procédure de montage et démontage des ouvrages provisoires y compris les sous-étais. Elle doit spécifier les exigences pour la manutention, le réglage, la contre-flèche, les charges, la dépose de l’étaiement, le décoffrage et le démontage.
La conception des étaiements doit prendre en compte la déformation pendant et après le bétonnage afin d’éviter toute fissuration préjudiciable du béton au jeune âge.
Dans le cas de précontrainte par post-tension, la déformation élastique du béton doit être prise en compte dans la disposition des étaiements. Les coffrages, les sous-étais et les étaiements ne doivent pas être démontés avant que le béton n’ait atteint une résistance suffisante.
Les efforts dans l’étaiement doivent être relâchés suivant une séquence assurant que les autres éléments de l’étaiement ou que tout support des constructions permanentes ne soient pas soumis à des sollicitations excessives. La stabilité de l’étaiement et du coffrage doit être maintenue pendant le relâchement des efforts et le démontage.
Lorsque le soutien par sous-étais ou le ré-étaiement de la structure est utilisé, les séquences de démontage doivent faire l’objet d’une note ou figurer dans les spécifications d’exécution.
Analyse des risques lors de l’utilisation de l’étaiement de génie civil
Les risques de l’étaiement de génie civil
Risques | Circonstances | Prévention |
Chute de hauteur | Au cours du montage ou du démontage de l’étaiement. | Utilisation des planchons lors du montage ou de planchers complets. Protection périphérique par garde-corps si possible intégrés aux montants de la tour. |
Troubles musculo-squelettiques | Lors de la manutention manuelle et de l’assemblage des éléments. | Utilisation de tours dont les éléments ont un poids limité du fait de leurs faibles dimensions comme cela est recommandé par la NT24 de la Cramif. |
Chute de plain-pied | Au cours du montage et du démontage de l’étaiement. | Utilisation des racks ou de paniers spécialement conçus pour ranger les éléments des tours d’étaiement. |
Effondrement | Sous l’effet de la charge à reprendre. Tassement différentiel (2 natures de sol différentes). | Calcul de l’étaiement de sorte que les charges reçues par l’étaiement ne dépassent pas les valeurs données par le constructeur. Calcul des appuis. Renforcer le sol, améliorer le calage. |
Basculement | Sous l’effet du vent au cours du montage. | Calcul de stabilité au cours du montage sous l’effet du vent. Liaisonner les tours entre elles ou bien les amarrer à la construction. Reprendre les efforts horizontaux sous l’effet d’un coffrage incliné. |
Risques divers de manutention mécanique | Au cours du déplacement de tours à l’aide d’un appareil de levage. | Utilisation d’un modèle de tour permettant le verrouillage des éléments entre eux et disposant de points de levage. |
Réglementation
Selon l'article R4534-105 du Code du travail, la conception des étaiements d'une hauteur de plus de 6 mètres est justifiée par une note de calcul et leur construction réalisée conformément à un plan de montage préalablement établi, sauf en cas d'urgence ou d'impossibilité. La note de calcul et le plan de montage sont conservés sur le chantier. Ces dispositions ne sont pas applicables aux étaiements mis en œuvre pour l'exécution des travaux souterrains.
L'enlèvement des cintres et des coffrages ainsi que l'enlèvement des charpentes soutenant ces installations ne peuvent être réalisés que sous le contrôle d'une personne compétente désignée par l'employeur (article R4534-106).
Il convient par ailleurs de se référer à la notice du fabricant d’étais qui indique la capacité des étais en fonction de leur classe et de leur déploiement.